IMG116-copie-1.jpgI.                 Les évolutions des grandes économies mondiales jusqu’en 2009

La crise bancaire, financière, économique et sociale que le monde connaît depuis l’été 2007 a modifié les équilibres des forces dans le monde. La croissance des pays industrialisés historiques du G7 a été sévèrement fragilisée. Les déficits budgétaires et les dettes publiques des Etats se sont singulièrement accrus, comme cela a été discuté dans de nombreux articles sur ce même site internet : www.nouvelle-dynamique.org. La croissance globale sur la période 1996 à 2009 dans les pays du G7 et de l’Europe industrielle montre un ralentissement au moment où les pays émergents accélèrent leur croissance.

   

Le tableau ci-dessous montre les difficultés de nombreux pays du G7 :

PAYS
  (G7+Europe)
Evolution PNB en $ courants 2006/1996 (en %) Balance Commerciale en 2006 (en Mds US$) Balance Commerciale en 2009 (en Mds US$) PNB en 2009 (en milliards de US$) Evolution PNB en $ courants 2009/1996 (en %)
Japon -15,6% 170,5 142,2 5 250,8 -1,2%
Allemagne 25,0% 189,1 168,1 3 385,4 42,7%
France 48,8% -13,0 -51,9 2 684,0 74,6%
Italie 64,3% -47,8 -66,2 2 081,9 83,9%
Etats-Unis  81,8% -802,6 -378,4 14 044,2 91,1%
Royaume-Uni 114,7% -80,9 -28,7 2 222,6 94,7%
Canada 121,0% 31,0 -22,6 1 325,4 131,1%
suisse 40,7% 56,9 23,6 449,6 49,3%
Autriche 38,6% 7,8 8,7 375,1 63,9%
Belgique 51,5% 8 1,3 470,3 77,3%
Danemark 65,8% 8,2 12,3 315,5 87,5%
Finlande 77,4% 9,5 3,5 237,9 99,4%
Portugal 74,6% -21,5 -24,0 217,5 101,9%
Pays-Bas 76,2% 63,1 40,3 807,8 103,7%
Espagne 109,7% -110,9 -80,4 1 427,0 146,9%
Norvège 122,7% 58,3 53,5 387,3 156,0%
Suède   33,3 30,2 414,4  

Le Japon et l’Allemagne continuent de profiter de leur avance dans la consolidation de leur économie industrielle. Les autres pays du G7 montrent leur faiblesse autant dans la croissance économique que dans leurs déficits du commerce extérieur. Ils sont suivis par le Portugal et l’Espagne. Les difficultés économiques, les déficits budgétaires et les dettes publiques définissent à nouveau les contours des grands pays en difficultés (Etats-Unis, Italie, France, Royaume-Uni et Canada pour le G7 ; Grèce, Portugal et Espagne pour les autres économies européennes en difficultés). Les autres pays de ce tableau traversent relativement sereinement la crise mondiale actuelle. Au sein des pays européens, à l'exception du Royaume-Uni qui s'est construit sur le modèle économique des USA, il se produit une différenciation dans les résultats économiques entre les Etats Gréco-Latins de l'Europe du Sud en très grandes difficultés économiques et de gestion financière publique (fortement déficitaires et très endettés) et les Etats Anglo-Saxons de l'Europe du Nord et la Scandinavie (fortement excédentaires et peu endettés).

    Alors que les pays industrialisés historiques voient leur croissance plafonner à 160% entre 1996 et 2009, sachant que la plus forte hausse pour les pays du G7 est canadienne plafonnant à environ 131%, les pays émergents présentent des situations historiquement confortables avec plus de 435% pour la Chine, 292% pour le Nigeria, 256% pour l’Egypte, 219% pour l’Inde et 218% pour la Turquie. Six pays des Emergents sur 22 pays étudiés ont connu une croissance inférieure à 100% entre 1996 et 2009 alors que seul le Canada pour les pays du G7 et cinq pays européens industrialisés ont dépassé difficilement cette barre symbolique de 100% sur la même période.

 

Globalement, dans la comparaison des croissances économiques des richesses créées entre les pays du G7 et les pays Emergents, il convient de remarquer que :

- entre 1996 et 2006, les sept pays du G7 (Etats-Unis, Japon, Royaume-Uni, Allemagne, France, Italie, Canada) ont réalisé une croissance moyenne de leurs richesses de 48% alors que les pays Emergents du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) réalisaient 132% et l'ensemble des 22 principaux pays Emergents dans le monde affichaient une croissance moyenne de 99%, soit plus du double de celle du G7 sur la même période.

- entre 1996 et 2009, la croissance moyenne des sept pays du G7 a été de 60% pendant que les BRICS réalisaient 252% (soit plus de 4 fois la croissance de l'ensemble des pays du G7 !) et même si l'on totalise la croissance des 22 principaux pays émergents, l'évolution est de 173% (soit près de 3 fois la croissance des pays du G7 !). 

 

La croissance mondiale est donc fortement et clairement tirée par les pays émergents en tête desquels on retrouve la Russie, l’Inde, la Chine, la Turquie,  le Brésil, l’Iran, le Pakistan, la Colombie l’Egypte et le Nigeria. L'Argentine a rencontré une éprouvante récession sur la période 1996-2006 jusqu'à une baisse de sa richesse nationale de 30% mais son commerce extérieur s'est redressé en 2006 affichant un excédent de 7,8 Mrds de dollars. Elle a poursuivi sur cette lancée avec une excédent de 8,8 Mrds de dollars en 2009, redressant globalement et rapidement son économie entre 2006 et 2009 ; ce qui lui permet d'afficher une croissance de 1,6% sur la période de 1996 à 2009. Les pays asiatiques ont traversé une grande crise  financière et économique dans leur sous-région vers la fin des anées 1990 et début 2000 qui se lit dans la croissance faible de la Corée du Sud, de la Thaïlande, de Singapour et de Taïwan. La Corée du Sud a même connu une forte récession entre 2006 et 2009. Mais ces pays se redressent spectaculairement grâce à des excédents de leur commerce extérieur performant de 20 G$ pour la Thaïlande à 43 G$ pour Taïwan et la Corée du Sud en 2009. Trois pays africains, le Nigeria, l’Egypte et l’Afrique du Sud comptent parmi les nouveaux champions de la croissance de l’économie mondiale.

 

Le tableau ci-dessous présente les évolutions comparées des pays émergents :

 

PAYS
  (G12+Autres Emergents)
Evolution PNB en $ courants 2006/1996 (en %) Balance Commerciale en 2006 (en Mds US$) Balance Commerciale en 2009 (en Mds US$) PNB en 2009 (en milliards de US$) Evolution PNB en $ courants 2009/1996 (en %)
Brésil 46,2% 13,6 -24,3 1 485,0 103,6%
South-Africa 104,5% -13,7 -11,3 277,6 124,8%
Russie 130,2% 94,7 49,5 1 207,2 188,9%
Inde 145,4% -9,3 -25,9 1 181,3 219,1%
Chine 202,4% 253,3 297,1 4 733,6 435,6%
Argentine -30,0% 7,8 8,8 303,2 1,6%
Corée du Sud 96,7% 5,4 42,7 835,9 72,5%
Indonésie 45,5% 10,9 10,8 485 120,5%
Australie 80,5% -41,5 -40,9 911,6 136,3%
Arabie Séoud 166,4% 99,1 22,8 372,5 171,8%
Turquie 168,7% -32,2 -14 619,2 218,0%
Thailande 10,0% 2,3 20,3 253,5 40,1%
Taiwan 48,7% 26,3 42,6 394 55,7%
Pologne 10,1% -3 -5 222,7 56,7%
Singapore 45,2% 35,4 33,8 166,5 80,2%
Philippines 47,0% 5,4 8,6 178,3 105,9%
Malaisie 69,1% 26,2 32 185,2 106,5%
Iran 78,0% 2,7 7,9 327,1 165,5%
Pakistan 105,4% -6,8 -9,4 169,9 168,4%
Colombie 97,7% -3 -5 222,7 181,5%
Egypte 103,0% 2,6 -3,3 189,4 256,0%
Nigeria 238,8% 33,9 22,9 163,4 291,8%
Mexique   -4,5 -5,2 859,9  

  Il apparaît nettement que les enjeux diffèrent selon que l'on s'adresse aux anciens pays industrialisés occidentaux ou que l'on se tourne vers les pays émergents. Le monde n'a pas un problème du niveau de croissance économique : il y a un déséquilibre entre les très faibles croissances des pays occidentaux et la surchauffe dans les pays émergents. Les enjeux des pays occidentaux industrialisés historiques sont centrés sur la maîtrise de la gestion publique des ressources financières devenues de plus en plus rares. Pour contenir les déficits budgétaires et éviter l'explosion des dettes publiques mises à la charge des générations futures, il faudra désormais accepter les compressions des dépenses publiques, réduire considérablement  le train de vie des Etats, mettre en place l'équité fiscale entre les revenus du travail, les revenus du capital et les revenus financiers d'une part, et entre tous les acteurs économiques d'autre part, sachant qu'ils ne retrouveront plus les croisances du niveau des pays émergents. Les recettes fiscales et sociales doivent alors couvrir toutes les dépenses publiques et servir à rembourser progressivement les emprunts et les intérêts. Quant aux pays émergents, devenus les nouveaux bailleurs de fonds du monde, ils doivent de plus en plus contribuer aux financements du développement des pays les plus pauvres de la planète, financer les équilibres économiques et sociaux sur leurs territoires, les infrastructures, l'éducation, la santé publique, tous les piliers du développement, et financer l'industrialisation et les innovations technologiques dans le respect de la saine gestion publique (lutte contre les corruptions et l'évasion fiscale, redistribution équitable des richesses produites, lutte contre les dumpings sociaux et écologiques, etc.) et de l'environnement.  Plus que par le passé où le monde était dirigé par un groupe de quelques pays partageant l'histoire et les proximités culturelles, les instances internationales de régulation doivent être vigilantes sur le respect des règles et des résolutions internationales, et agir avec efficacité pour prévenir contre l'insécurité des hommes et des biens dans un monde devenu totalement hétérogène et multipolaire.

 

II.   Conclusion :  

 

       La croissance mondiale est rythmée par les pays émergents qui constitueront les nouveaux pays industrialisés du 21ème siècle. Il importe dès maintenant de fixer les règles de la gestion économique mondiale. Les économies industrielles en construction devront impérativement recourir à des procédés industriels inédits dans l’histoire de l’humanité en préservant les équilibres écologiques de nos ressources mondiales afin d’entretenir correctement la vie de plus de 7 milliards d’humains sur cette terre. Plus que dans le passé, l’équilibre de l’homme dans la société et dans l’économie avec la nature exigent une nouvelle définition des priorités. Les crises mondiales à l’échelle planétaire que nous avons traversées depuis 1929 ainsi que les revendications sociales actuelles consécutives à une régulation insuffisante du capitalisme mondial devraient nous imposer de nouveaux comportements. L’entreprise n’a plus comme finalité de « maximiser les profits » mais « d’optimiser le bien-être social de son écosystème ». Les banques n’ont plus pour seule ambition de s’enrichir par tous les moyens au détriment des autres acteurs économiques, mais de financer équitablement l’économie réelle de la production et des services. Les Etats n’ont plus le rôle d’entretenir les privilèges catégoriels et d’appauvrir les nations par l’usage inconsidéré des déficits budgétaires et des dettes publiques, mais d’assurer l’équité entre les citoyens à travers les définitions rigoureuses des politiques publiques nationales et internationales ; de veiller scrupuleusement à des régulations financières, économiques et sociales nationales et internationales à travers les redistributions des richesses produites et enfin de veiller au respect des règles édictées à travers les contrôles équitables dans le fonctionnement des politiques publiques et de la gestion des finances publiques. Les pays industrialisés historiques et les pays émergents sont embarqués dans les mêmes contraintes et les mêmes impératifs pour le bien de l’Humanité.

 

 

IDEmmanuel Nkunzumwami

Auteur de « La Nouvelle Dynamique Politique en France », Editions L’Harmattan.

 

Analyste économique

Chroniqueur sur  Radio Africa n°1 et sur Radio France Bleu Picardie.

Candidat aux Elections Européennes de 2009.

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