Par Emmanuel Nkunzumwami
Auteur de « La Nouvelle Dynamique Politique en France »,
Editions L’Harmattan, Paris, Décembre 2007.

 

Après le « non » au référendum sur le Traité Constitutionnel pour l’Europe du 29 mai 2005, amplifié par le référendum des néerlandais aux Pays-Bas, nombreux sont les déclinologues qui auguraient la sortie pour des décennies de la France du wagon de tête de l’Union Européenne. Le président Nicolas Sarkozy vient de nous montrer ses grands talents de négociateur et de reconstructeur de l’Europe. Il nous l’avait dit lui-même : « je suis profondément européen ». Il vient de le démontrer. Il nous avait promis une « Traité Simplifié » pour redémarrer l’Europe. Nous avons été nombreux à nous interroger sur les moyens de faire redémarrer l’Europe, sachant que le Traité Constitutionnel pour l’Europe comportait des éléments difficiles à le faire adopter par tous les peuples européens. De plus, l’adoption d’un « traité à caractère constitutionnel » en France n’aurait pu se faire sans consulter à nouveau le peuple, donc proposer un nouveau référendum avec une quasi-certitude de son  rejet. Sur ce site, nous l’avons déjà démontré à plusieurs reprises : l’Europe était devenue une « machinerie trop complexe » pour qu’une constitution « fourre-tout » ait un sens pour les citoyens. Nous avions donc proposé de « décomposer le problème européen en sous-problèmes » et les résoudre séparément. C’est cette méthode que vient de proposer et réussir le Président Nicolas Sarkozy et nous ne pouvons qu’en être fiers et heureux. Souvent une simple formulation d’une affirmation suffit à soulever de violentes contestations. « L'UNION OFFRE A SES CITOYENS UN MARCHE INTERIEUR OU LA CONCURRENCE EST  LIBRE ET NON FAUSSEE » a donné une formidable occasion de sortie d’artillerie lourde des opposants à l’ancien Traité Constitutionnel pour l’Europe. Cette affirmation a été retirée du Traité Simplifié. Nous avions démontré que cette affirmation était dénuée de fondement, car la concurrence, au sein de l'Union Européenne, est déjà libre et faussée :

 

 

 

Dégagée de ses blocages politiques, l’Union Européenne peut engager un travail de fond sur les harmonisations nécessaires à son développement. Dès l’adoption du Nouveau Traité Simplifié prévu à l’automne 2007 au Sommet de Lisbonne et mis en ratification « rapide », sans doute par voie parlementaire pour l’ensemble des pays de l’Union Européenne,  le Traité Simplifié serait mis en application dès le 1er janvier 2009. Des dérogations seront accordées à certains pays sur certains volets du Traité : le Royaume-Uni pouvant s’exonérer de l’application de la Charte de l’Union, la Pologne se mettant à l’écart de la double majorité jusqu’en 2017, etc. Nous avons déjà connu des traitements spécifiques des États de l’Union lors de l’application du « pacte de stabilité et de croissance », selon le niveau de préparation des États membres. Il convient de rappeler que le Traité de Rome de 1957,  efficace pour l'Europe des 6 pays fondateurs, avait déjà connu des traités ultérieurs qui ajustaient l'interfonctionnement des 12, puis des 15, mais devenaient de plus en plus inefficaces pour les 25 et encore moins pour les 27 aujourd'hui. Si le vote des décisions à l'unanimité était naturel pour les 6 pays fondateurs, il est devenu illusoire de l'imaginer pour les 27 qui présentent parfois des intérêts contradictoires pour une même décision, notamment en matière fiscale, économique, industrielle et d'attribution des fonds de développement régional. Il fallait donc revenir sur les fondements de "l'Europe Politique" et redéfinir les règles de fonctionnement, l'identité de l'Europe et le fonctionnement de ses Institutions. Les principaux points du Traité Simplifié sont donc :

- l'amendement des deux traités fondateurs et constitutifs (Traité de Rome de 1957 et le Traité de Maastricht de 1992).

- un président élu pour un mandat de deux ans et demi dès 2009.

- il n'y aura plus de référence à un Etat Fédéral européen ; aussi la notion de "Constitution pour l'Europe" est totalement caduque.

- la fonction de "ministre des affaires Etrangères" pour l'Europe est remplacée par le "Haut Représentant de l'Union Européenne pour la Politique Etrangère et le Sécurité". Ainsi chaque Etat membre garde son Ministre des Affaires Etrangères impliquant un Etat membre souverain dans ses engagements propres, puisqu'il n'y a pas de notion de "super Etat fédéral" en Europe.

- le principe du vote en double majorité appelée "Majorité Qualifiée" : 55% des Etats de l'Union représentant 65% de la population pour voter une décision pour l'Union. Prévu pour 2009, ce principe entrera en vigueur en 2014.

 

 Remise sur les rails, l’Union Européenne peut maintenant préparer d’autres dossiers structurants pour sa construction : les harmonisations fiscales, sociales et économiques et l’organisation de ses politiques industrielles, technologiques, du savoir, de la Recherche et Développement, et mieux s’organiser dans la Mondialisation. Les arguments avancés par certains ténors socialistes selon lesquels les avancées obtenues grâce à l’action du président Nicolas Sarkozy ne tiennent donc pas : on ne peut pas remettre dans le nouveau Traité Simplifié les éléments contestés des parties II et III de l’ancien mort-né Traité Constitutionnel  pour l’Europe. Il faut donc redéfinir d’abord l’identité politique, culturelle, géographique, institutionnelle de l’Europe. Après, nous mettrons du contenu : fiscal, monétaire, économique, social, industrielle, technologique, etc… avec des négociations au niveau des États membres et au niveau de l’Union. Différencier les sous-problèmes de l’Europe pour les résoudre efficacement et durablement. C’est ainsi que nous obtiendrons des résultats. Cette méthode donne, une fois de plus, raison à la démarche du Président Nicolas Sarkozy.

 1°) la concurrence fiscale est déjà une réalité : les taux d’imposition de la TVA et de l’impôt sur le Revenu et de l’impôt sur les sociétés, principaux impôts européens, sont tellement disparates qu’ils constituent à eux seuls les raisons des délocalisations et des fuites des cerveaux au sein même de l’Union Européenne. Un jeune diplômé expert en informatique ou en Sciences a intérêt à s’exiler en Irlande ou au Royaume-Uni pour y exercer son art avec de gros revenus assurés. Une entreprise aura intérêt à implanter son siège social en Slovénie pour bénéficier de l’exonération de l’Impôt sur les bénéfices de la Société, etc… Et nos taux de TVA varient d'un pays à l'autre dans la fourchette de 15% à 25%, suffisamment large pour créer une vraie concurrence fiscale entre les Etats membres. Les disparités fiscales sont un énorme moteur des désordres économiques au sein même de l’Union. Mais l’harmonisation fiscale, même souhaitée par tous les européens, ne peut s’organiser à très court terme, car elle sous-tend les grandes politiques économiques et sociales des États-membres.

 

 

 2°) la concurrence sociale est caractéristique des rythmes de transformations, des réformes et de développement : les européens ne sont pas égaux en matière de salaire minimum légal. En janvier 2007, un salarié bulgare pouvait gagner 92€ bruts par mois, pendant que son équivalent luxembourgeois, au même poste et doté de mêmes compétences, gagnait 1570€ bruts par mois ; soit un rapport de 1 à 17 entre le premier et le dernier salaire minimum européen. En moyenne basse, la Grèce propose 666€ brut par mois, et en moyenne haute, la France rémunère à 1254€ bruts par mois. Mais à ces inégalités criardes au sein de l’Union Européenne vient s’ajouter une autre spécificité : sept pays de l’Union ne se sont pas dotés d’un salaire minimum. Ce sont l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie, Chypre, le Danemark, la Finlande et la Suède. Le SMIC français se situe au sixième rang européen parmi les vingt pays qui en sont dotés, derrière dans l’ordre croissant la Belgique, les Pays-Bas, la Grande-Bretagne, l’Irlande et le Luxembourg. Pour les tenants au modèle social français, ils comprendront que le SMIC français est inférieur à celui de la Belgique et du Royaume-Uni ! A ces écarts s’ajoutent une autre complication économique et sociale européenne : en France comme en Bulgarie, les smicards représentent 17%  des salariés ; en Grande-Bretagne et en Espagne, les smicards représentent moins de 3% des salariés. Comparé aux États-Unis, le Smic français est 1,9 fois supérieur à celui d’un américain MAIS le Smic français rémunère 17% des salariés alors que le Smic américain en rémunère seulement 1,3% !

 

 

 3°) la concurrence économique et monétaire est également une réalité : au 31 décembre 2006, douze pays de l’Euroland ont dû supporter les écarts désavantageant les exportations européennes qui s’effectuent en dollars. En effet, les produits industriels tels les automobiles, les avions, les machines-outils, les produits technologiques, etc… sont exportés et valorisés en dollar. Conçu pour flotter autour de la parité Euro/Dollar, le dollar s’est considérablement déprécié jusqu’à des cours de 1,36 Dollars pour un Euro, rendant nos produits européens peu compétitifs car « mécaniquement » rendus 36% plus chers sur les marchés internationaux par le fait du cours de change Euro/Dollar. Pendant ce temps, les treize autres pays de l’Union Européenne pouvaient ajuster leurs monnaies par rapport au Dollar pour poursuivre les rythmes mondiaux du commerce international. Même si de nombreux pays ont tiré le paquebot Europe, notamment le Royaume-Uni, l’Allemagne, le Benelux et l’Espagne dont les excédents commerciaux ont sauvé l’honneur de l’Europe en 2006, la croissance moyenne européenne reste à la traîne de la croissance économique mondiale, rythmés par les États-Unis, la Chine, l’ Inde, la Corée du Sud et de nombreux pays émergeants.

 

 

 Pour faire redémarrer l’Europe en panne depuis deux ans déjà, il fallait une nouvelle initiative qui parte de ses fondements : le fonctionnement des institutions européennes. Donc reconstruire l’Europe à partir de l’Europe politique et la Modernisation de ses Institutions à partir d’un Traité Simplifié. Le Président Nicolas Sarkozy s’y était engagé pendant la campagne présidentielle et dans son Projet Présidentiel. Et il a tenu parole. Il s’est engagé aux résultats et nous avons obtenu des premiers résultats sur l’Europe : La double majorité pour les votes engageant l’Union pour ne pas bloquer les réalisations par manque d’unanimité, impossible à réunir pour les 27 États membres ; une présidence tournante affaiblit la visibilité de l’Europe, donc un président élu par ses pairs pour deux ans et demi pour stabiliser le fonctionnement du Conseil de l’Europe ; un haut représentant de l’Union Européenne pour les relations extérieures qui représente l’Europe et présente ses positions à l’International sur divers sujets d’engagements politiques, une charte de l’Union, définissant l’identité politique, géographique, morale, culturelle… de l’Europe.

 

 

 

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