Les pays européens particulièrement frappés par la pandémie du covid-19 entament la phase de déconfinement des populations. Au-delà des annonces des uns et des autres, où en sommes-nous dans l’expansion de cette pandémie et ses conséquences ?

Les évolutions constatées entre le 3 et 18 avril 2020 indiquent une prévisibilité encore faible pour la fin de la pandémie au sein des pays de l’Union européenne et au Royaume-Uni. Nous n’avons encore aucune visibilité concrète sur les conséquences sanitaires, sociales et économiques au sein même de ces pays. Les situations restent tendues.

     L’Italie, qui est le pays le plus touché par cette pandémie au sein de l’Union européenne, connaît un nombre encore très important de victimes du covid-19. Au cours de cette période et par intervalle de trois jours, le nombre de cas testés positifs évolue de plus de 10.500 personnes, - à l’exception d’une légère accalmie avec une progression de 8.792 entre le 12 et le 15 avril- alors que la progression du nombre de personnes guéries reste inférieure à 7.000 personnes. Elle n’est donc pas suffisante pour inverser les évolutions entre les personnes contaminées et les guérisons. Il y a encore plus de personnes qui contractent l’infection que celles qui en guérissent. Le rythme des décès reste élevé avec une progression de plus de 1.500 décès tous les trois jours. Depuis le début de la pandémie, le pays a enregistré un total 23.227 morts du covid-19 au soir du 18 avril 2020. La situation est donc encore loin du déconfinement.

     En Espagne, la progression des cas testés positifs est supérieure à 13.500 personnes en cumul de compte tous les trois jours -sauf une légère accalmie avec une hausse de 11.614 personnes entre le 12 et le 15 avril-  et celle de cas guéris reste inférieure à 12.000 personnes. L’évolution des guérisons est même à la baisse depuis le 12 avril. Il faudrait attendre plusieurs jours pour enregistrer une inversion croissante et durable de ces progressions en faveur des cas guéris, en raison du nombre encore important de cas infectés (plus de 190.000 personnes testées positives). Par ailleurs, les décès continuent d’évoluer au rythme  de plus de 1.400 personnes tous les trois jours. L’on constate néanmoins une nette tendance à la baisse depuis le 9 avril, même si le pays compte 20.043 décès du covid-19 au soir du 18 avril. Il faudrait alors une stabilisation puis une baisse du nombre de personnes infectées, un accroissement très significatif du nombre de personnes guéries et une diminution des cas en réanimation dans les hôpitaux pour amorcer le déconfinement. Ce sera une manifestation de la diminution de la propagation du virus. Enfin, il faudra une diminution jusqu’à zéro du nombre de nouveaux décès quotidiens du covid-19. Nous n’y sommes pas encore.

     En France, la dynamique des évolutions est encore plus importante que chez les deux derniers pays voisins. La progression des personnes infectées est supérieure à 14.800 personnes en nombre cumulé tous les trois jours. L’on note cependant une diminution jusqu’à 3.930 nouveaux cas entre le 15 et le 18 avril. Il faudrait alors que cette tendance se poursuive pour inverser durablement les contaminations et les guérisons.  La progression des personnes guéries reste inférieure à 6.000 personnes, alors que le pays compte 151.793 cas testés positifs au 18 avril. Le rythme des décès est également plus important qu’en Italie et en Espagne, avec un cumul de plus de 2.100 nouveaux décès du covid-19 tous les trois jours. La France a atteint un cumul de 19.323 morts du covid-19 au soir du 18 avril et devrait dépasser les 20.000 décès avant le 21 avril 2020. Il faudra attendre plusieurs jours pour observer une inversion entre la progression des contaminations et celle des guérisons, ainsi qu’une baisse significative des morts de la pandémie. Un déconfinement total brutal et généralisé avant cette inversion exposerait de nombreuses personnes à la contamination, et donc à l’accroissement des patients dans les urgences médicales, avec un accroissement de la mortalité. Remplir les quatre conditions reste encore un objectif lointain : diminuer la propagation par une très faible progression tendant vers zéro de nouveaux cas infectés, accroître fortement la progression des guérisons pour résorber le nombre des personnes infectées, réduire le nombre encore important de patients en réanimation dans les hôpitaux et dans les urgences pour cause de covid-19 et réduire à zéro le nombre de décès quotidiens de ce virus. Les données au 18 avril 2020 sont encore loin de chacune de ces quatre conditions pour un déconfinement généralisé prévu le 11 mai 2020. Les pouvoirs publics seront amenés à étudier finement les modalités et les personnes concernées par le déconfinement progressif et le confinement continu pour les personnes fragiles. De même, le pays devrait se doter des capacités de tracking des personnes infectées, afin de les isoler et les traiter, afin de réduire au maximum de nouvelles opportunités de contaminations dans les déplacements.
 
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     Le Royaume-Uni est entré tardivement dans la contamination massive par rapport à ses voisins du continent. La progression est alors supérieure à 13.400 nouveaux cas tous les trois jours et les guérisons restent très faibles, voire insignifiantes au regard de la progression quotidienne des cas de contamination. En effet, l’on enregistre moins de 400 cas de guérisons tous les trois jours. Le nombre de décès progresse de plus de 2.200 personnes tous les trois jours depuis le 9 avril 2020, avec un rythme supérieur à celui de la France. Il atteint 15.464 morts cumulés au soir du 18 avril 2020. Le pays est donc encore loin d’atteindre la pic, et donc encore très loin du déconfinement.

     Les pays du Benelux (Pays-Bas, Belgique, Luxembourg) sont peu peuplés individuellement par rapport aux pays précédents. Néanmoins, proportionnellement à leurs populations, la progression atteint plus de 2.500 personnes infectées tous les trois jours aux Pays-Bas. Le pays compte 31.589 cas testés positifs au 18 avril 2020, alors qu’il n’affiche pas une progression dans les guérisons bloquées à 250 personnes. Cependant, l’évolution du nombre de décès en progression est supérieure à 340 tous les trois jours, avec un total de 3.601 décès au 18 avril 2020. Quant à la Belgique, elle connaît une progression plus élevée que celle des Pays-Bas et une position plus dégradée dans les trois situations : les contaminations progressent de plus de 3.600 cas tous les trois jours, mais avec une réelle tendance à la baisse depuis le 12 avril  ; l’évolution des guérisons reste inférieure à 1.300 au regard de la progression des contaminations, alors que le pays compte 37.183 cas testés positifs ; le nombre de décès se stabilise autour d'une progression de 1.000 morts tous les trois jours pour atteindre un cumul de 5.453 décès du covid-19 au soir du 18 avril 2020. Le Luxembourg reste en léger retrait, en raison même de son très  faible niveau démographique. Il a enregistré 3.537 cas testés positifs et 25 cas de guérisons au 18 avril. En comparaison des autres pays, il ne déplore qu’un cumul de 72 décès sur son petit territoire.

     Enfin, l’Allemagne se singularise par la faible mortalité du covid-19 par rapport à la France, l’Italie, l’Espagne et le Royaume-Uni, pays de tailles comparables en Europe. Malgré un nombre de cas de 143.342 testés positifs au 18 avril 2020, la progression est restée longtemps inférieure à 6.400 cas cumulés tous les trois jours. Elle a néanmoins connu un rebondissement à 9.886 nouveaux cas positifs entre le 15 et le 18 avril. Cependant, l’évolution du nombre de personnes guéries reste supérieur à celle des contaminations, autour de 12.300 à 12.800 personnes depuis le 12 avril 2020. Le pays connaît alors une inversion durable entre les évolutions des guérisons et des contaminations. Avec un nombre total comptabilisé à 4.459 décès du covid-19, la progression reste inférieure à 900 morts tous les trois jours, -même si l’on observe une tendance à la hausse depuis le 12 avril, passant de 510 à 867 décès tous les trois jours- contre la France qui enregistre plus de 2.100 et plus de 2.200 au Royaume-Uni. Le tableau ci-dessous synthétise des évolutions comparées de ces pays au sein de l’Union européenne :

     Ces différentes situations au sein des principaux pays frappés par la pandémie du covid-19 au sein même des principaux pays de l’Europe indiquent toutes les difficultés pour programmer le déconfinement. Il apparaît ainsi que le déconfinement ne pourra qu’être progressif au sein de l’Union, et que les pays les moins touchés, telle que l’Allemagne, garderont leurs frontières fermées pour contrer l’importation du virus des pays voisins. Pour la France, il faudra attendre une inversion continue et durable entre la décélération très significative de la contamination, des patients admis en urgences dans les hôpitaux, de la mortalité, d’une part, et la progression importante des cas de guérison, d’autre part. A la date du 18 avril 2020, le pays en est encore loin. https://youtu.be/FO3yjkCz900

     Au vu de d’intensité de la présence du coronavirus en France, en Italie, en Espagne et au Royaume-Uni, le déconfinement devra être précédé  de :

  • Un dépistage massif de la population ou du moins des personnes fragiles ou nettement exposées aux situations de contaminations (accueil du public, transports en commun, écoles, espaces de vente, etc.).
  • Une décontamination des lieux de rencontre du public (théâtres, cinémas, matériels de transports en commun, salles de réunion, open spaces, restaurants, magasins, etc.).
  • Un maintien en confinement de toutes les personnes testées positives et susceptibles de contaminer les autres. Le cas échéant, le port du maque sera obligatoire. Le strict respect de toutes les mesures barrières devra rester de rigueur pour tous et partout.
  • Un suivi médical de toutes les personnes malades confinées.

Conclusion :

Il y aura eu la vie du pays d’avant le covid-19 et celle de l’après. Nous allons sûrement repenser nos modes de vie et de travail. Nous allons nous poser des questions sur nos besoins : l’indispensable, l’utile et le superflu. Nous aurons un autre regard sur le monde, le contenu et le sens de nos actions, nos relations et sur la fragilité de nos vies. Un petit rien, nanoscopique, invisible à notre œil,  insignifiant mais virulent et tellement méchant qu’il s’acharne pour ôter la vie à un humain, nous a imposé son rythme. Celui qui a conquiert l'espace, l’infiniment grand, et qui sait sonder le contenu du picomètre, l’infiniment petit, se plie face à l’insignifiant virus. Tout s’est brutalement arrêté pour laisser passer cet ennemi invisible de l’humain. Réchauffement climatique, pollution aux nanoparticules, émissions de gaz à effet de serre, intense activité de destruction de la biodiversité, cadences infernales de production, compétition par la vitesse, etc. le SARS Cov-2, baptisé comme une tempête sur le nom du saint du jour de notre éphéméride, covid-19, nous a imposé son jeu : l’arrêt de toutes les activités non indispensables à notre vie quotidienne et le confinement pour tous. L’environnement et la terre auront respiré pendant toute la période de confinement de plus de quatre milliards d’humains. A tous ceux qui ne parviennent jamais à se mettre d’accord, malgré tous les sommets sur le climat et la préservation de la planète, le respect du droit du travail et de la vie, la circulation des biens et des personnes, le cov-19 a imposé un arrêt total et prolongé pour s’écouter. Et comme l’humain ne peut obéir sans la sanction et l’épée de Damoclès pour le rappeler à l’ordre, il a dû d’abord sacrifier plusieurs centaines de milliers de vies au jugement du covid-19. C’est sa règle, brutale et non négociable. A ce douloureux prix, les nuisances diverses et les pollutions de toutes natures ont été très fortement diminuées, jusqu’à nous faire oublier que nos villes et nos villages sont peuplés. Le calme est revenu, les familles se sont retrouvées ; en confinement spatial ou par les moyens modernes d’échange et de communication. Dehors, on ne se rencontre plus, sinon à plus de deux mètres de distance minimum obligatoire. Le virus nous aura appris à effectuer un arrêt dans tous nos mouvements, à réfléchir sur l’essence et les priorités de nos vies, et à nous projeter dans un nouvel avenir plus responsable, plus respectueux de notre environnement et plus humain. Et il nous laisse cette question : qu’est-ce que la vie ?

 

Emmanuel Nkunzumwami
Ecrivain - Essayiste
Analyste économique et politique
Email : emmankunz@gmail.com
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