Parlement Européen          Nous sommes entrés dans le XXIème siècle avec des nouveaux défis qui nous imposent de nouveaux comportements et de nouvelles solidarités. La crise que nous traversons a déjà été largement commentée quant à ses multiples dimensions morales, de spéculations boursières honteuses, des banques peu scrupuleuses, des investisseurs devenus des spéculateurs au détriment des faibles et des plus fragiles, économique et financière, etc… en bref, nous traversons une crise de civilisation et des valeurs humaines. A cette crise au multiple visage, certains gourous proposent de très mauvaises solutions. Les intégristes religieux, sous diverses appellations, tentent de se substituer au Dieu d’Amour pour proposer leurs châtiments. Al Qaeda a donné le top départ en s’attaquant aux « méchants » Américains et à leur symbole de puissance : les « Twain Tours » de New York, le 11 septembre 2001. Et depuis lors, ses diverses branches au Moyen-Orient et en Afrique prolongent l’action du « Maître Oussama Ben Laden ». Et même au Maghreb, il veille à l’expression démocratique,  républicaine et de souveraineté en France en contestant les lois votées par le Parlement français. Les attentats se multiplient en Belgique, au Royaume-Uni et tentent de s’exporter en Allemagne via le pays fragile de l’Union Européenne, la Grèce. A la profonde crise qui fragilise les Européens, Al Queda veut superposer la violence et la mort pour les punir…

Les Efforts de l'Europe pour faire face à la Crise

            La crise économique et financière qui s’est amplifiée depuis la banqueroute de la banque d’affaires américaine Lehmann Brothers en 2008 continue de produire des effets collatéraux en Europe : la faillite de la Grèce, puis celle de l’Irlande. Toute l'Europe du Sud est sous les projecteurs des spéculateurs qui tentent d’allumer les feux partout où un pays marque des signes de fatigue et de faiblesse. Et c’est l’Union Européenne tout entière qui est appelée au secours pour sauver sa zone Euro et sa monnaie malmenée. Mais que disent les Citoyens ? Ils imposent une justice et veulent la construction de nouvelles solidarités. Que les fautifs payent leurs gloutonnerie ! Puisque ce sont les banques commerciales qui ont « joué au casino de la spéculation boursière et immobilière », alors qu’ils paient à leur tour. La France l’a déjà expérimenté en 2008-2010. L’Etat s’engage à venir au secours de ses banques commerciales en contrepartie de la rémunération de l’argent prêté. N’en déplaise aux détracteurs du Gouvernement de Nicolas Sarkozy et François Fillon, cette intervention auprès des banques commerciales a rapporté 1,9 milliard d’Euros d’intérêts pour le Trésor Public, et les banques secourues se sont dépêchées de rembourser les dettes consenties pour ne plus supporter ces intérêts ! Mais comment font-elles pour rembourser aussi vite et dégager des bénéfices ? La plupart ont repris leurs habitudes de spéculations sur les marchés boursiers, d’autres ont recouru à leur sociétés financières pour pressurer les consommateurs. Les spéculations se renforcent toujours après chaque crise... depuis les années 1920 !

       Aujourd'hui, lorsqu’un citoyen achète un crédit à la consommation avec un taux d’intérêt de plus de 21% pour une durée « illimitée par le Crédit Revolving » alors que le prêteur l’a acquis entre 3% et 5%, c’est le Citoyen qui rembourse la dette de la banque et lui apporte une part de ses bénéfices.  Mais en même temps, les banque se font concurrence entre elles et même entraînent leurs Etats à se faire concurrence entre eux. Et cela entraîne, au niveau des Etats et des Banques Centrales, le grand désordre monétaire international. Ensuite, l'on reporte la faute aux marchés spéculatifs sur la dette. Mais que sont les acteurs de ces "Marchés" , cette entité aussi insaisissable, sans visage, impersonnelle et multiforme à laquelle nous sommes habitués comme l'opinion publique ou la Communauté Internationale ?  "Les Marchés", ce sont principalement les banques internationales -banques d'investissement-, les Fonds d'Investissement et les Fonds de Gestion d'Actifs, les Compagnies d'assurance, les gestionnaires des fonds de pensions ainsi devenus les "prêteurs" de fonds, alors que les Etats et les entreprises côtées en bourse deviennnent des "emprunteurs". Le G20, présidé par la France pour un an de novembre 2010 à novembre 2011, et le G8 vont tenter de mettre un peu d’ordre entre les Etats pour réduire la spéculation sur les monnaies avec le commerce international. Concrètement, les nouveaux pays émergents (Brésil, Russie, Inde, Chine, Indonésie, Mexique, Turquie, etc.) entretiennent la sous-évaluation  de leur monnaie nationale pour exporter dans les pays où la valeur de la monnaie est plus forte (zone Euro et Zone Dollar). Les coûts de production très faibles dans les pays émergents et le différentiel sur les cours de change à l’exportation constituent à eux seuls la principale part de leurs marges commerciales à l’export. Ainsi, le prix de vente aux consommateurs des produits fabriqués dans les pays émergents est très inférieur aux coûts de production des mêmes produits en zone Euro et en Zone Dollar. Plus l’Euro ou le Dollar sont forts, plus les pays émergents réalisent des bénéfices supplémentaires sur les cours des changes des monnaies. Sur le plan budgétaire et financier, aucun pays de l'Union Européenne ne satisfait les critères de la gestion prudentielle de Maastricht, soit une déficit budgétaire n'excédant pas 3% et la dette publique inférieure à 50% du Produit Intérieur Brut de chaque Etat. Or tous les pays ont largement dépassé ces barrières.

       Aujourd'hui, la France affiche une dette publique de 83% du PIB et un déficit budgétaire de 8% mais elle emprunte sur les marchés au taux de 3,1%  sur 10 ans, au lieu de 2,7% au début de l'année 2010, grâce à sa notation du AAA et à ses capacités réelles de remboursement. Le Gouvernement espère ramener le déficit budgétaire à 6% en 2011, puis à 4,6% en 2012 et enfin revenir à 3% imposés par les critères de Maastricht en 2013 si la croissance économique se poursuit à un rythme supérieur à 1,5% par an. Mais la situation est plus compliquée pour la Grèce, et pour l'Irlande dont le déficit budgétaire est de 32,3% du PIB et qui se voit opposer un taux d'emprunt de 9% sur les marchés. Elle a donc besoin d'une aide communautaire pour émerger. L'Espagne, 4ème puissance économique de l'Union Européenne, affiche un défit budgétaire de 10% de son PIB mais elle a déjà engagé des réformes pour baisser ce déficit. La dette du Portugal qui se monte à 86% de son PIB  n'a rien de catastrophique mais pour prévenir les difficultés dûs à la crise, il a également engagé des réformes dont le relèvement du taux de TVA et la baisse de certains salaires pour réduire le déficit budgétaire et diminuer la dette publique. Vus du Citoyen au quotidien, les mécanismes des marchés compliquent la consommation et la production intérieure en Europe. Comment, en effet, expliquer qu'un immeuble neuf, achevé et en attente d'occupation peut démarrer les ventes des appartements à 4.800€/m² et terminer les ventes de son stock avec 7.500€/m², simplement par la loi de la spéculation immobilière ? Une entreprise industrielle dont on connaît le cycle industriel (Conception, Fabrication, Essais et Tests, Production et Mise sur le marché) pouvant s'étendre sur plusieurs mois, voire des années, peut-elle supporter la volatilité de son cours de bourse heure par heure ? Peut-on décemment demander un rendement net de plus de 15% à une entreprise industrielle dont le secteur croît péniblement au rythme de 1,5% par an, sans compression de charges de personnel, de charges de production, de baisse de la qualité des matières premières pour respecter la baisse générale des charges lorsque le Chiffre d'affaires ne croît plus ? Comment résoudre l'équation à plusieurs inconnues avec la rareté de l'emploi, les salaires, la faible croissance économique et l'explosion des dettes publiques ? 

        En plus des difficultés  budgétaires, tous les pays Occidentaux sont confrontés au vieillissement de leurs populations qui les a conduits à relever l'âge de départ à la retraite de 62 ans en France à 68 ans en Allemagne et au Royaume-Uni entre 2018 et 2049, afin de faire face à leurs déficits sociaux. Ces différents déficits pèsent lourdement aujourd'hui sur la monnaie unique, l'Euro. Dans cette zone monétaire, les Etats doivent désormais concevoir les politiques de consolidation longue de la consommation et de l'investissement, et stimuler la production intérieure et les exportations vers les pays émergents qui rythment le moteur de l'économie mondiale. Or relancer la consommation des ménages et renforcer les investissements des petites et moyennes entreprises passe par leurs facilités d'accès au financement bancaire et par des taux d'emprunts bas. Les taux longs à moins de 4%, les taux courts à moins de 8%  et les taux à la consommation des menages à moins de 12% seront indispensables à cet effort. Le métier des Banques sera ainsi revalorisé par le financement de l'économie réelle au lieu de perdre une partie de leurs fonds propres et des fonds de leurs épargnants dans des spéculations hasardeuses  qui ont conduit à la crise actuelle. La responsabilité des Etats pour surveiller et réguler les activités des banques devient impérative. Ainsi depuis le dernier sommet du G20 à Séoul et la prise en charge des dossiers du G20 par la France, les Dirigeants nous promettent des projets ambitieux : 1°) Refonder le système monétaire international ; 2°) Instaurer une taxation sur des transactions financières internationales dont le produit sera injecté dans l’aide aux Pays les Moins Avancés dans le monde ; 3°) Réguler les marchés des matières premières pour endiguer la faim dans le monde et réduire les spéculations sur les matières premières entrant dans la production industrielle et dans l’énergie. Telle est l’ambition que va proposer la France et les défis que va relever notre ministre de l’économie et des finances. En effet, il indispensable de mettre en ordre ces nouvelles solidarités internationales si l’on veut éviter les catastrophes et leurs conséquences sur l'aggravation des déséquilibres et des violences dans le monde. Et pour entretenir une Europe forte et soutenir l'Euro, les Etats ont le devoir de coopérer sur les politiques industrielles, économiques, fiscales, sociales et exiger des efforts de maîtrise de gestion publique. 

Les Efforts de la France face à la crise et à l'impératif des Réformes

            La France doit s’attaquer également à ses propres déséquilibres intérieurs. Comment pouvons imaginer que depuis 1974, nous vivons avec les budgets en déséquilibre ? Les dépenses publiques n’ont jamais cessé d’augmenter d’année en année. Et lorsque les recettes publiques baissaient ou que l’écart devenait important entre les recettes et les dépenses, la France créait des impôts nouveaux ou augmentait les taux d'imposition des impôts existants sous le prétexte de construire plus de solidarités. Mais, pendant très longtemps, les Dirigeants ne se sont pas posé la question sur la pertinence de certaines dépenses publiques que l'on pouvait baisser ou supprimer. Certes l’Etat a perçu l’argent des nouveaux impôts et taxes, mais le peuple n’a jamais cessé de plonger dans la précarité et la pauvreté. On estime aujourd’hui que plus de 12 millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté, soit 908€ par mois. Les Restos du Coeur, inventés par Coluche pour un an en 1984, ont distribué 103 millions de repas à 830.000 bénéficiaires en 2009, soit déjà 30.000 personnes nourries de plus qu'en 2008 ! Cependant, plus de solidarité devrait signifier plus de travail pour un plus grand nombre d’actifs et moins d'assistanat ; mais la France continue de reposer principalement sur les tranches d’âge de 25 ans à 55 ans ! Avant 25 ans, les jeunes sont en formation, dans les études ou au chômage. Après 55 ans, les séniors sont considérés comme trop vieux pour travailler et les entreprises les renvoient à la maison ! Et pendant ce temps, moins de 50% des contribuables paient l’Impôt sur le Revenu alors que de nombreuses Petites et Moyennes Entreprises se déclarent en déficit pour échapper à l’Impôt sur les Sociétés lorsque les Grandes Entreprises profitent des crédits d’impôts divers (investissements, recherche, aide aux PME, etc.). Où sont alors les ressorts de la solidarité si tous les acteurs économiques ne contribuent pas à l’effort collectif ?  Il avait été souhaité que les bénéfices nets -après impots et taxes- des entreprises soient distribués à parts égales entre les actionnaires, les salariés et l'autofinancement pour l'investissement et le développement de l'entreprise. C'est un souhait non réalisable partout mais qui imprime une démarche d'équité entre acteurs dans des entreprises. Une étude récente montre que globalement les dividendes distribués aux actionnaires se sont accrus  plus de 20 fois au-dela la croissance des salaires. Les déséquilibres passent également par cette voie. Une idée lancée au cours des privatisations de 1986 recommandait l'accroissement de l'actionnariat populaire et l'accroissement de l'actionnariat des salariés dans des entreprises.

        Il se pose clairement une question évidente des redistributions dont le défaut crée des "travailleurs salariés pauvres". L'on pourrait convenir que les salaires et donc la rétribution pour le travail connaissent une évolution régulière pour procurer une croissance structurelle des revenus du travail. Mais aussi, encadrer la distribution des dividendes et offrir les montants équivalents aux salariés sous des formes diverses de redistribution (intéressement, participation aux fruit de l'expansion, primes, etc.) qui deviennent des revenus complémentaires conjoncturels des salariés. Ainsi, si une entreprise réalise le bénéfice net comptable après impôt de 100 millions d'Euros, si elle évalue ses besoins d'investissement en année n+1 à 50 millions d'Euros et souhaite porter en réserve 30 millions d'euros, il reste 20 millions à partager entre les actionnaires apporteurs de financement et les salariés créateurs de richesse de l'entreprise. Il apparaît alors équitable de redistribuer 10 millions aux actionnaires sous forme de dividende et un même montant de 10 millions au salariés sous des formes diverses de supplément d'intéressement, primes de productivité, actions et parts gratuites de l'entreprise. On crée ainsi du revenu supplémentaire pour la consommation et l'investissement pour tous les acteurs économiques, et on récompense les salariés prêts à développer davantage leur entreprise et à conquérir de nouveaux marchés.  Il faut donc poursuivre les réformes en France. Lors de l'intervention télévisée du 16 novembre 2010, le  Président de la République, Nicolas Sarkozy, a précisé une belle pensée social-libérale : "récompenser ceux qui travaillent et réussissent et aider ceux qui rencontrent des handicaps ou éprouvent des difficultés".  C'est une position centrale de la cohésion sociale active qui tire le pays et les Citoyens vers le haut, et donne une dimension positive à la solidarité nationale ! Il a ensuite indiqué certains chantiers prioritaires dès 2011 : 1°) Revoir le bouclier fiscal et les diverses niches fiscales pour harmoniser la fiscalité en France et dans son principal partenaire Européen, l’Allemagne ;  2°) Reformer l’Impôt sur la Fortune avec l’objectif de « taxer les revenus du patrimoine » et non le patrimoine lui-même. En clair, récompenser fiscalement ceux qui travaillent et réussissent et aider ceux qui rencontrer les handicaps ou qui éprouvent des difficultés. 3°) Proposer systématiquement les Contrats de Transition professionnelle pour les licenciés économiques, renforcer les aides pour les embauches des personnes âgées de plus de 55 ans et sanctionner les entreprises qui pratiquent les discriminations sociales dans les entreprises. 4°) Renforcer l’apprentissage et les formations professionnelles auprès des Jeunes pour accroître les qualifications et leur donner plus de chance d’accéder au travail. Si ces ambitions sont suivies d’effet, par la volonté de tous les acteurs économiques et des pouvoirs publics, alors la France aura construit de nouvelles solidarités. Car derrière tous ces efforts se trouvent les solutions aux financements des retraites, de la santé publique et de la prise en charges de personnes âgées dépendantes. La Cohésion sociale n’aura de sens concret que par la réduction de la précarité et de la pauvreté, par le partage des richesses et l’exercice de la juste redistribution des revenus des entreprises à travers les augmentations des salaires, et par la solidarité intergénérationnelle et intragénérationelle entre les populations.

Emmanuel Nkunzumwami

Auteur de la Nouvelle Dynamique Politique en France, Editions L'Harmattan.

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