L'INTERVENTION ARMÉE CONTRE LES PUTSCHISTES AU NIGER EST UNE FOLIE INACCEPTABLE : LE NIGER A BESOIN DU DÉVELOPPEMENT, PAS DE LA GUERRE
23 août 2023Les Africains et les Panafricanistes interrogent, à juste titre, les interventions des originaires d’Afrique en Europe et en Amérique sur la crise actuelle de la CEDEAO (Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest). Il convient alors de répondre à cette interrogation que de nombreux écrits ont été commis, de nombreuses interventions sur des chaînes de radio et de télévision ont été diffusées et enregistrées sur les situations explosives dans de nombreux pays en Afrique. Dès lors, la question se retourne vers les « Africains de l’intérieur » et les dirigeants des pays africains et de la France eux-mêmes : avez-vous lu les publications et les ouvrages produits sur l’Afrique depuis 2010 (pour ne rester que dans l’actualité de la dernière décennie écoulée).
Situation géographique de la CEDEAO en Afrique de l'Ouest : 15 pays de l'Afrique Occidentale subsaharienne.
Sur le site : www.nouvelle-dynamique.org, une publication du 02 juin 2023 interpelle les dirigeants africains et occidentaux. En voici un extrait qui rappelle les six piliers fondamentaux du développement économique et social des nations :
« Au-delà de la Région de l’Afrique du Nord – Arabo-musulmane, relativement stable et en voie d'émergence avancée pour quatre des sept pays de cette Région, l’Afrique Sub-saharienne souffre encore de l’insécurité des territoires, des populations, des institutions et des investissements de développement. Pourtant, cette sécurité est le premier des piliers du développement. La sécurité des Africains doit demeurer constamment la priorité des gouvernants, le socle de la souveraineté internationale et l’axe principal des efforts des nations.
Rappelons les cinq autres piliers du développement, valables pour toutes les nations du monde. Vous retrouvez leurs contenus détaillés et des comparaisons entre les pays au sein de chaque Communauté Economique Régionale (CER), dans le livre « La Relance de l’Afrique » (Editions L’Harmattan, 2017). Les comparaisons internationales, entre l'Afrique et le reste du monde dans les dynamiques des évolutions entre 1990 et 2016, sont même présentées dans cet ouvrage.
2°- la sécurité alimentaire, sanitaire, médico-sociale et environnementale. Un peuple sous-alimenté, peu ou pas soigné, ou vivant dans l’insalubrité chronique ne peut accéder au développement. Les terres africaines sont richement fertiles pour nourrir durablement et aisément le milliard d’Africains, et exporter vers le reste du monde. La biodiversité de la flore lui permet durablement de produire l’essentiel des traitements des maladies spécifiques à l’Afrique.
3°- l’éducation de la jeunesse, l’alphabétisation des adultes, la recherche et le développement au sein des institutions africaines pour l’Afrique. C’est dans le devoir impératif des Etats d’organiser, bâtir, contrôler et développer l’éducation, du cycle primaire à l’enseignement supérieur et la recherche. Pour améliorer la performance, l’Etat peut faire appel à des partenaires intérieurs ou extérieurs, privés ou des familles, et mobiliser toutes les ressources indispensables à la réussite et à l’atteinte des résultats pour le progrès de la nation.
4°- l’accès à l’électricité pour la totalité des populations africaines. C’est une singularité africaine : plus du tiers des 54 pays du continent n’ont pas encore atteint 50% d’accès à l’électricité pour leurs populations. Or, les progrès actuels reposent pour l’essentiel sur l’utilisation de l’énergie électrique, tant au niveau domestique que professionnel. Le continent est irrigué par de nombreux cours d’eau et de nombreuses chutes pour produire de l’hydroélectricité et la transporter sur la plus importante partie du continent ; il est couvert par le soleil toute l’année pour produire de l’électricité avec des stations solaires. Il peut même opérer l’appoint ponctuel avec l’énergie à base d’hydrocarbures, au même titre que l’Allemagne produit encore aujourd’hui de l’électricité thermique à partir du charbon. La part de l’Afrique dans le dérèglement est inférieure à 5% ; elle ne pourrait donc pas être considérée comme un pollueur direct de la planète.
5°- la création, le développement et l’entretien des infrastructures de communication et des équipements de transports sur tous les territoires. C'est le cœur des investissements physiques de développement. Les voies fluviales, les routes et autoroutes, les chemins de fer qui doivent irriguer tout le continent et relier tous les pays, desservir les zones enclavées et relier les territoires de production et les espaces de consommation, permettre les mobilités entre tous les pays, toutes les régions et tous les territoires du continent. L’électricité devient alors indispensable au développement des chemins de fer du 21e siècle. D’énormes étendues de nombreux pays exigent l’intensification des moyens de transports rapides : les trains à grande vitesse et les avions. Les Communautés Economiques Régionales deviennent alors des instances incontournables de décision et de financements efficaces pour faire face à ces investissements vitaux pour les Africains.
6°- la transformation industrielle et la valorisation des ressources produites en Afrique (ressources agricoles, forestières, minières, énergétiques, etc.). De lourds investissements (matériels d'usines, maîtrise technologique, compétences en ressources humaines, etc.) liés à l'industrialisation peuvent dissuader certains pays pauvres. C’est au niveau de la CER que ces investissements deviennent pertinents. Produire à partir des ressources naturelles africaines, transformer pour créer de la valeur ajoutée, consommer les productions africaines en Afrique pour le développement, exporter les excédents sur les marchés internationaux, intégrer l’éducation et la recherche dans les besoins de l’industrialisation de l’Afrique... telles sont les clés de succès pour atteindre le développement économique et social à horizon 2040 ».
Dans un autre texte extrait du livre : « La Relance de l’Afrique » (Editions L’Harmattan, 2017), on peut également relever ce bel extrait sur la situation économique et sociale au Niger en 2016 :
« Le Niger est le pays le plus pauvre de l’Afrique occidentale, et il figure en bonne place parmi les pays les plus pauvres du monde. Le pays occupe la première place par sa superficie en Afrique occidentale, soit 1,267 million de km², devant le Mali, avec 1,247 million de km². Il est également proportionnellement plus peuplé, avec 20,752 millions d’habitants, quand le Mali en compte 18,957 millions. Mais, en 2016, le produit intérieur du Niger n’est que de 7,509 milliards de dollars, contre 12,747 milliards pour le Mali. Le Niger est-il aussi victime d’un manque de ressources naturelles pour se développer ? Certes, le pays est situé en plein désert du Sahel, et il en a subi des conséquences de la sécheresse, comme en 2005 où l’aridité du sol, la sécheresse et les criquets ont provoqué une famine touchant plus de 10% de la population du pays. L’économie du Niger est basée sur l’exploitation de l’uranium par la compagnie française AREVA. Les gisements historiques se situent à Arlit. Mais en 2009, AREVA a étendu son contrat d’exploitation sur Imouraren, considéré comme le premier gisement d’uranium en Afrique et le deuxième dans le monde, après celui de McArthur River au Canada. Le Niger possède également des mines de charbon dans la région de Tchirozerine. Enfin, le pays exploite également le pétrole. Cette ressource énergétique a été estimée par la compagnie chinoise, la CNPC (China National Petrolium Corporation), à une production de 200.000 barils par jour, dans le nord-est du Niger, au sein du bloc d’Agadem, vaste de 27.516 km². Néanmoins, en comparaison avec les autres grands producteurs de pétrole, le Niger fait figure de petit entrant. La raffinerie de Zinder ne produit que 20.000 barils par jour. Devant cette modeste production en Afrique, on peut citer les grandes raffineries du Cap (112.000 au Cap et 87.500 à Sasolburg) et de Durban (172.000 à Sapref et 125.000 à Engen) en Afrique du Sud ; Skikda (323.000 barils/jour), Alger (59.000) et Arzew (54.000) en Algérie ; Luanda (55.000) en Angola ; Limbe (42.000) au Cameroun ; Société ivoirienne de raffinage (70.000) en Côte d’Ivoire ; Alexandrie (105.000 à Midor et 105.000 à APC EI MEX), Amerya (100.000), Assiout (52.000), Mostorod (165.000), Suez (70.000), Le Caire (35.000) en Egypte ; Accra (45.000) au Ghana ; Mombasa (90.000) au Kenya ; Ras Lanouf (220.000) et Zawiya (120.000) en Libye ; Mohammédia (160.000) au Maroc ; Kaduna (110.000), Warri (125.000), Port Harcourt (60.000 à Alesa Eleme et 210.000 à PHRC) au Nigeria ; Khartoum (100.000) au Soudan ; la STIR (34.000) en Tunisie. Aussi, ces pays produisent et raffinent plus de quantités de pétrole que le Niger. Les regroupements des pays pour mutualiser les ressources et investir collectivement dans des raffineries plus importantes, moyennant redistribution des revenus au prorata des quantités brutes apportées et des constructions d’oléoducs pour acheminer et d’autres moyens d’acheminement pour transporter les produits, participeraient aux stratégies industrielles régionales. Et, en Afrique occidentale, la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Nigeria sont de plus grands producteurs de pétrole que le Niger, mais ce dernier devrait développer l’industrie extractive du pétrole pour compléter d’immenses ressources d’uranium pour relever son économie. Les autres secteurs sont inexistants, telle que l’agriculture, ou atrophiés tel que le tourisme, victime des défaillances criantes des infrastructures de transports, de communication et d’aménagement du territoire. En effet, pour une étendue équivalant à 2,3 fois celle de la France métropolitaine, le Niger ne compte que deux aéroports de Niamey et Agadez.
Pays riche par son sous-sol de pétrole, d’uranium, de charbon et sûrement de nombreux autres minerais de grande valeur, mais également très pauvre, le Niger n’a produit que pour 7,509 milliards de dollars en 2016, avec une progression de 5,0%, en comparaison avec l’évolution démographique de 3,9%. Néanmoins, avec un indice de fécondité de 7,6 enfants par femme, le plus élevé en Afrique, les conditions économiques du Niger ne permettent pas un progrès social dans le pays. Cette fécondité participe également à la dégradation des conditions de vie des familles et l’incapacité pour le pays à faire face à la demande médico-sociale, alimentaire, énergétique, d’aménagement des pôles économiques de développement et de l’éducation de la jeunesse. Un planning familial, qui optimise et ajute les naissances aux ressources réelles des familles, sera indispensable. Le taux de mortalité infantile de 5,7% en 2015 est très au-dessus de notre référentiel de 1,0% pour l’Afrique. De même, une mortalité globale de 0,9% est très supérieure à la cible de 0,5%, même si elle figure parmi les plus modérées de la région, face à 1,50% pour la Guinée Bissau ; 1,45% pour la Sierra Leone ; 1,38% pour le Mali et 1,32% pour le Nigeria, qui sont les champions régionaux de la mortalité. Le Niger devrait investir dans le secteur sanitaire et dans la prévention. Néanmoins, parmi les causes connues de la mortalité, la malnutrition et l’insécurité alimentaire figurent sur le tableau d’affiche, en raison des conditions climatiques et l’aridité des sols pour l’autosuffisance alimentaire, alors que les ressources économiques et financières du pays sont insuffisantes pour importer et nourrir pleinement toute sa population. La fécondité élevée agit alors comme un mécanisme de substitution démographique face à la mortalité. Les croyances culturelles, religieuses, philosophiques ou la simple résignation de fatalité face à la mort et à la multiplication des naissances deviennent des justifications sociales. Aussi, certaines familles pauvres multiplient les enfants dans l’espoir que les plus âgés participent avec leurs parents à l’alimentation et l’éducation des plus jeunes. Dans ces conditions, l’école peut apparaître comme une distraction, une perte de temps et de ressources de main-d’œuvre pour les familles rurales pauvres.
L’éducation n’a pas été un axe stratégique de développement du Niger pendant plusieurs décennies après l’indépendance du pays, soit quarante années après cette indépendance. Entre les années 2000 et 2015, la scolarisation des enfants à l’école primaire a pu évoluer de 27,4% à 63,3%. C’est le plus gros retard d’éducation remarqué en Afrique au début des années 2000. La route reste encore longue pour atteindre 99% des enfants scolarisés en primaire, à l’horizon 2025. En contrepartie de ces médiocres efforts dans l’éducation primaire, le taux d’analphabètes bat le record du continent avec 73,4% de la population. L’on peut comprendre alors la part de la culture orale et des traditions ancestrales dans l’évolution de la société nigérienne. L’effort dans la scolarisation dans l’éducation primaire devrait participer à la réduction de l’analphabétisme dans le pays. Le niveau de scolarisation dans le second degré est resté très faible ; la part des jeunes scolarisés est restée pratiquement constante à 28% dans le premier cycle du second degré, alors qu’il a légèrement régressé entre 12,7% et 11,8% dans le second cycle du second degré. Il apparaît que les indicateurs socioculturels et sociodémographiques du Niger restent encore très bas, du point de vue des fondements sur l’éducation de la jeunesse, l’alphabétisation des adultes et le niveau de la mortalité dans le pays. Ils se traduisent dans l’indice de développement humain de 0,35/1 en 2015, le plus bas niveau de toute l’Afrique occidentale. L’autre pays se situant au rang équivalent est la République centrafricaine (0,35/1 et un produit intérieur brut par habitant de 285 dollars, en 2015) ».
Sur la décennie 2010-2020, -période incluant la présence militaire de la France et de l’ONU (Minusma au Mali). A elles seules, elles dépensaient 1,64 milliard d’euros par an au Mali sans verser un seul euro au gouvernement malien- les résultats relevés en Afrique de l’Ouest interpellent tous les dirigeants de la CEDEAO. Quelles sont les stratégies de développement économique et social avez-vous partagées avec les populations ? Quels progrès avez-vous accomplis pour les habitants et pour vos pays ? Les grands dirigeants sont reconnus pour les améliorations qu’ils ont apportées au progrès dans leurs pays et au bien-être reconnu de chacun de leurs habitants. Avant de s’abattre sur les putschistes, que ce soit au Mali, en Guinée, au Burkina Faso et, plus grave encore, au Niger, il convient de s’interroger d’abord sur les attentes non assouvies des peuples de ces pays. Depuis 1960 que la France a « officiellement fermé la porte de la colonisation », que sont devenues ses anciennes colonies en Afrique Occidentale comme en Afrique Centrale ? Les dirigeants français comme leurs obligés dirigeants africains corrompus, enfermés dans des idéologies creuses à dessein et des manipulations des foules par des concepts inopérants de légalité des pouvoirs et de l'ordre constitutionnel opportunément invoqués, prétendument piétinés par l’armée du pays et le peuple en colère, devraient interroger les familles, les jeunes en déshérence, les artisans appauvris par les multinationales, les petits commerçants privés de marchés quand ils ne respectent pas les règles des détournements de fonds publics et des corruptions du système, les chômeurs chroniques désespérés, les instituteurs sans écoles pour cause d’insécurité permanente ou alors oubliés par le trésor public dans les paies de fin de mois, les professionnels de santé ignorés par les profiteurs du chaos pour venir se faire soigner en Occident, les déclassés dans la misère des zones urbaines comme les oubliés de territoires ruraux, les candidats aux migrations suicidaires vers les pays de rêve en Occident et qui ignorent les cauchemars des originaires d’Afrique déjà installés qui y souffrent, etc. Qu’attendent toutes ces populations ? La rigueur de gestion de leur pays, la probité de leurs dirigeants et le développement économique et social qui améliore leur vie sur leurs terres d’origine. Et face à cette demande légitime, ils rencontrent les gabegies et les pillages de leurs ressources publiques, les corruptions généralisées, le népotisme amplifié par le régionalisme et le tribalisme, les détournements de fonds publics affectés aux projets de développement, la désespérance au sein de l’immense partie de la jeunesse bloquée devant les portes de l’avenir. Les révoltes s’ensuivent et accompagnent les prises de pouvoir par les armées. Les dirigeants qui crient contre les putschistes ne veulent pas reconnaître leurs responsabilités dans la lente décadence de ces pays africains. Contre le Niger, les dirigeants français sonnent la charge et leurs obligés au pouvoir en Afrique s’agitent, menacent d’engager une guerre au Niger en faveur d’un président désavoué par les Nigériens et déposé par l’armée, tentent de lever leurs modestes armées locales pour aller écraser les pauvres Nigériens, au prétexte de ramener au pouvoir un autre obligé, Mohamed Bazoum. Mais quel pouvoir réel avait cet homme au Niger appauvri, affamé, assiégé par les "terroristes" bien pris en charge, renseignés, fortement équipés et entraînés par les puissances extérieures pour massacrer les populations opportunément tribalisées, ethnicisées, manipulées, apeurées et les soldats des armées nationales ? Ce n’est pas la majorité des Nigériens qui réclame le « retour de Monsieur Mohamed Bazoum » au pouvoir au Niger, mais les dirigeants français et leurs alliés obligés d’Afrique. Qui peut imposer aujourd’hui un dirigeant à une population et une armée qui n’en veulent plus (au prétexte qu’il a été démocratiquement élu avec un fort appui des puissances extérieures intéressées par l’appât du gain) ? Il est donc clair que les Nigériens aspirent, à juste titre, à se libérer et se prendre en charge pour bâtir leur avenir.
La magie du totem appelé CEDEAO ne fonctionne plus ! La guerre au Niger ne sera pas la réponse aux nombreux problèmes de gouvernance de ce pays. Les dirigeants belliqueux qui reprennent le discours de Paris pour l’amplifier contre leurs voisins de la même organisation devraient réfléchir aux carences graves internes au Niger comme dans certains autres pays de l’Afrique Occidentale arrimés inconditionnellement, corps et âmes, aux puissances extérieures. Au sein des quinze Etats la CEDEAO, certains se sont déjà désolidarisés des tueurs à gage engagés contre le Niger par les dirigeants français : la Guinée Conakry, le Mali, le Burkina Faso, le Niger alors que d’autres n’approuvent pas cette folie. L’Union africaine, après un très long débat inhabituel, rejette l’attaque armée contre le Niger. Le président burundais, le général Evariste Ndayishimiye, représentait l’Union africaine en sa qualité de vice-président de cette Organisation panafricaine, au sommet de la CEDEAO réuni pour préparer l’intervention armée au Niger. Il a vivement exprimé l'opposition de l’UA à l’intervention armée. Mais, il a immédiatement été désavoué par Alassane Dramane Ouattara, président de la Côte d’Ivoire, celui qui affirme qu’il ne doit rien à personne d’autre qu’à la France. Les Ivoiriens apprécieront ces aveux. Il est donc prêt à brûler un pays africain voisin pour répondre à la volonté de ses maîtres de Paris. Cependant, la Guinée Conakry, le Mali et le Burkina Faso ont clairement affirmé que toute attaque contre le Niger sera considérée comme une attaque contre toutes ces nations, et riposteront en union avec le Niger. Ils sont donc prêts à contre-attaquer. Nul doute que d’autres pays africains pourraient se joindre à cet élan de solidarité et le piège pourrait vite se retourner contre les dirigeants va-t’en guerre au service de la France pour détruire le Niger.
Six piliers fondamentaux structurent le développement économique. Mais dans les fondations, on retrouve l’ambition nationale de la dignité collective, de l’unité nationale, de la solidarité du peuple et du dialogue social. Le tablier des appuis du développement est naturellement la bonne gouvernance, la probité des dirigeants, la rigueur de gestion, la démonstration des réalisations et des succès par des résultats : il se résume dans les principes ORC (Orientation et organisation des politiques publiques ; Règlementation et régulation du fonctionnement de la nation et de ses organes ; Contrôle et correction pour diffuser les résultats et sanctionner les déviances). La démocratie tant chantée et vantée s’appuie sur ces données ; à défaut, elle n’existe pas, tel un mirage. Elle ne nourrit pas ceux qui ont faim, ne soigne pas les malades, ne remplace pas l’instituteur et le professeur, ne se substitue pas aux infrastructures inexistantes ou défaillantes, n’apporte pas l’électricité aux populations, et ne remplace pas les usines et industries de transformation.
Présentation simplifiée du modèle ORC.
La démocratie a besoin d’un sol fertile pour s'enraciner, se développer, mûrir et porter du fruit au profit du peuple.
Pour apprécier la situation au Niger et adhérer aux demandes du peuple nigérien, il convient de revoir les évolutions de ce pays au sein de l’Afrique Occidentale. Quatre photos suivantes devraient rendre humbles les belliqueux en mission contre le peuple qui a souffert et qui souffre encore :
Photo n°1 : Tableau de synthèse de l’Afrique de l'Ouest en 2016
Le Niger est le pays le plus pauvre de l'Afrique Occidentale et produit environ, 363 dollars par habitant et par an. Il se situe à la dernière colonne de ce tableau. La population connaît une forte croissance de 3,9% par an, grâce à un indice de fécondité le plus élevé d’Afrique : 8 enfants par femme en âge de procréer en moyenne. La mortalité infantile atteint près de 60 enfants sur mille. Le niveau d'alphabétisation des adultes est bloqué sous la barre de 30% : c'est le plus bas de la Région. en 2020, le niveau de la scolarisation primaire des enfants a dégringolé à 27% et à 28% pour le 1er cycle du second degré, puis à 13% dans le second cycle du second degré. Le Niger est alors en compétition avec le Burkina Faso et le Mali dans la contre-performance sur les socles de l'éducation et de la sécurité médico-sanitaire et environnemental. Pendant ce temps, la France a déployé les opération Serval puis Barkhane, alors qu'elle est présente dans ces pays depuis leur indépendance. La responsabilité de la dégradation des condition de vie des Nigériens, des Burkinabé et des Maliens incombe à tous les dirigeants de ces pays et de la France qui n'ont rien fait. Au sein de la CEDEAO, le Niger affiche les plus faibles niveaux sur les indices du développement économique et social au cours de la décennie 2010-2020.
Photo n°2 : Accès à l'électricité en 2020 en Afrique Occidentale
Le Niger et le Burkina Faso sont encore les derniers de la CEDEAO dans l'accès des populations à l'électricité. Alors que le Niger atteint plus de 25 millions d'habitants, derrière le Nigeria (219,5 millions), le Ghana (32,8 millions), la Côte d'Ivoire (27,5 millions), devant le Burkina Faso (22,1 millions) et le Mali (21,9 millions), le niveau d'accès à l'électricité n'est que 19,3% d'habitants au Niger et 19,0% au Burkina Faso. Où est l'intégration économique de la CEDEAO ? Pourquoi la France qui exploite les gisements d'uranium au Niger et les dirigeants de ce pays ne se sont-ils pas intéressés à ce pilier indispensable au développement des nations modernes ? De même, sur la période de 2011 à 2020, le taux de progression dans l'électrification du Niger et du Burkina Faso est le plus bas de toute la CEDEAO (6%). Il est donc compréhensible que les habitants de ces deux pays, qui se sentent oubliés de leurs dirigeants en complicité avec les dirigeants français, appellent au changement radical et immédiat dans la gouvernance de leurs pays.
Photo n°3 : Situation comparée de l'accès à l'électricité des populations en 2020 et de l'importance démographique.
Le Niger figure parmi les huit pays africains à moins de 20% de la population accédant à l'électricité. Au sein de la CEDEAO, il partage ce faible record avec le Burkina Faso. Les autres pays sont le Soudan du Sud, le Tchad, le Burundi, le Malawi, la République Centrafricaine et la République démocratique du Congo. La marge de progression pour atteindre au moins 80% d'accès à l'électricité reste encore importante. Le Niger a besoin d'appui important des partenaires économiques et de solidarité intrarégionale des pays de la CEDEAO pour accélérer le développement et non des va-t'en guerre pour détruire les maigres résultats actuels face à ses 27 millions d'habitants en 2023 et la plus forte croissance démographique en Afrique.
Photo n°4 : Estimation du produit intérieur brut (PIB)/habitant en 2023
Au sein des vingt pays pauvres dans le monde avec un PIB de moins de 1000$/habitant et par an, dix-neuf sont en Afrique. A l'exception du Malawi et du Madagascar, tous les autres pays ont connu des violences armées sévères au cours de la période de 1990 à 2020 ; soit dans les guerres civiles, soit dans des attaques terroristes (Mali, Burkina Faso, Niger, Mozambique), soit en encore dans la pire barbarie de génocide contre les Tutsi au Rwanda. En Afrique Occidentale, la Sierra Leone et le Niger sont les pays les plus pauvres avec moins de 600$ par habitant en 2023. Les peuples demandent du développement économique et social.
Conclusion
La population du Niger appelle au secours à travers son armée. Elle constate que le pays ne progresse pas malgré les richesses disponibles. La France qui a lancé les hostilités contre le Niger, se retrouve désormais sur le banc des accusés (pillage, soutien aux corruptions généralisées et détournements de fonds publics alloués aux projets de développement, soutien au terrorisme qu’elle prétend combattre, etc.) dans l’ensemble des pays francophones africains. En menant la charge de violence armée contre le Niger, les dirigeants français desservent les relations de la France avec les pays africains, notamment face à la jeunesse africaine. Certes, les responsabilités sont partagées entre les dirigeants politiques français et africains dans le désastre économique et politique longtemps entretenu au sein des pays de l’Afrique Occidentale. En proposant ses services de sécurisation avec son armée depuis 2012 au Sahel, la France n’a pas atteint le résultat attendu sur la sécurisation des populations qu’elle prétendait protéger. Elle est accusée de complicité avec les mêmes terroristes. Les armées africaines engagées dans la lutte contre les terroristes au Mali, au Burkina Faso et au Niger ont perdu des milliers de soldats face à quelques centaines de terroristes, entraînés, équipés et renseignés par les puissances extérieures. La France et les Etats-Unis se retrouvent alors sur un autre banc des accusés de complicité avec des terroristes qu’ils prétendent pourtant combattre. Au Sahel, chaque puissance défend clairement ses propres intérêts aux dépens de la sécurité des populations locales et du développement économique et social. Les Etats-Unis d’Amérique pourraient se substituer à la France, un petit acteur sur l’échiquier géopolitique mondial appartenant à une vaste colonie américaine appelée "Union européenne" à travers l’OTAN. Ils ont besoin d’affronter directement la Russie et la Chine sur le terrain africain pour défendre et maintenir leur leadership dans le monde.
Plutôt que d’engager un bras de fer avec les nouvelles autorités du Mali, du Burkina Faso, du Niger et de la Guinée Conakry, soutenues par leurs peuples et déterminées à chasser l’armée française de leurs terres, la France devrait revoir de fond en comble sa politique de coopération avec les pays d’Afrique. La filiale de l’Union européenne, baptisée "CEDEAO" est en liquidation sous la pression des populations africaines concernées. Les dirigeants africains représentants des intérêts français en Afrique Occidentale sont sur les pistes de sortie. En s’entêtant dans le bras de fer, la France risque de perdre les quelques pays amis qui lui restent comme vitrines sur le continent. Cependant, il est encore temps de poser les fusils et éteindre les moteurs des engins de guerre pour négocier les partenariats avec les pays africains. S’il s’agit de l’uranium du Niger, la France accepte de négocier les termes de l’exploitation et de l’importation de ses 2500 à 2800 tonnes sur un besoin de 8000 tonnes nécessaires à l’alimentation des réacteurs nucléaires français. Combien sur l’équivalent de 120 millions d’euros de cet uranium parviennent-ils au trésor public du Niger ? Il faut donc interroger les dirigeants du Niger et de la France. Il en sera de même pour les autres ressources énergétiques, minières, agricoles ou forestières. C’est la loi de l’offre et de la demande enseignée dans nos écoles d’économie. La France a des besoins légitimes pour son industrie et son économie, comme les autres pays du monde. Elle négocie, achète, exploite et paie le prix du marché. Elle détient des compétences, dispose des équipements et des savoir-faire. Les pays africains disposent des ressources recherchées : alors les partenaires africains et français se mettent autour de la table et négocient le partage des revenus pour l’intérêt de leurs peuples respectifs. Les besoins des Africains sont immenses sur chaque pilier du développement indiqué. L’accès à l’électricité fait partie des besoins du Niger : les barrages hydroélectriques et les stations solaires, mutualisés avec les autres pays de la région, pourraient répondre à ce besoin. Les infrastructures et les moyens de transport (terrestres et aériens) pour désenclaver les populations de cet immense pays sont indispensables. Le niveau de scolarisation des 27 millions de Nigériens (en 2023) est le plus bas de l’Afrique pour le pays qui connaît la plus forte croissance démographique : une action forte et urgente de redressement est vitale pour former et projeter la jeunesse vers l’avenir. Il appartient aux dirigeants africains de définir leurs ambitions, leurs projets de développement, leurs programmes de réalisations et les résultats attendus pour le progrès dans leurs pays. Personne ne viendra le faire à leur place ; même pas la France. Les principes ORC s’appliquent à tous, pour le bon fonctionnement des Etats et des organes de contrôle. Les entreprises françaises compétentes sont nombreuses, mais elles doivent s’inscrire dans la production et le résultat mesurable sur le chemin du développement économique et social. A défaut, elles seront évincées au profit d’autres partenaires des autres pays. Aujourd’hui, le savoir-faire s’est diffusé dans de nombreux pays d’Asie, d’Europe, d’Amérique. Il appartient désormais aux Africains de définir leurs priorités, et aux partenaires extérieurs de leur apporter leurs compétences et leurs savoir-faire pour y répondre. Les peuples d’Afrique ne sont pas des ennemis du peuple de France, mais ils s’opposent désormais aux pratiques coloniales et à la confiscation de leurs ressources par des prédateurs, de quelque pays qu’ils viennent dans le monde. La Nouvelle Afrique, celle de la jeunesse et du développement économique et social, s’est réveillée. Au Niger, comme dans les autres pays en panne de développement par défaut de bonne gouvernance, les transformations passent par la révolte de la jeunesse et la prise du pouvoir par ceux qui sont engagés à l’accélération du développement. Bien entendu, la France défend ses intérêts en Afrique, mais les Africains défendent aussi légitiment leurs intérêts pour le développement économique et social de leurs pays. L’intervention armée contre le Niger, prétendument pour restaurer l’ordre constitutionnel en réinstallant le perdant Mohamed Bazoum, est une pure folie, qui pourrait emporter toute la CEDEAO et les dirigeants belliqueux de cette région. Laissons les Nigériens construire la route de leur destin avec leurs dirigeants. Ils ont choisi l’armée pour les diriger, c’est leur affaire. Ils savent ce qu’ils veulent pour l’avenir de leur pays et de leur jeunesse. Au sein de l’Afrique Nouvelle en construction, les nouveaux dirigeants panafricanistes se révèlent. En contrepartie, les dirigeants qui trahissent cette Afrique nouvelle, leurs propres pays et leurs propres peuples, au prétexte d'être "démocratiquement élus" (éléments de langage des soutiens extérieurs qui financent ces trucages) avec de forts appuis très intéressés des prédateurs au détriment du progrès en Afrique, pourront désormais en répondre devant la jeunesse désespérée en colère.
Ce pays pauvre, meurtri du Niger, qui résiste derrière son armée malgré de fortes pressions internationales sur les Putschistes, mérite notre respect. L'ancien président Mohamed Bazoum (qui ne supporte pas le riz et les pâtes dans sa résidence surveillée !) et ses soutiens nigériens -dont son ancien ministre des affaires étrangères- pourraient être déférés en justice pour haute trahison : appeler les armées étrangères, en profitant de sa haute position politique et de son influence reconnues, pour attaquer leur propre pays est un acte de haute trahison. Ensuite, il y aura des délits économiques : détournements de fonds publics, spoliations des biens de l’Etat, corruptions en bandes organisées en intelligence avec les puissances extérieures. Il appartient aux nouvelles autorités militaires du Niger et du nouveau gouvernement de prendre l’initiative de création d’un Fonds de Solidarité pour affecter les fonds saisis au soutien des initiatives de la jeunesse et des entrepreneurs pour le développement au Niger. L’Armée et un nouveau gouvernement ont pris les commandes d'un pays en état de grande pauvreté : tous les indicateurs du développement sont au rouge, le terrorisme, les connivences coupables entre les dirigeants français et nigériens. Aidons le Niger à se reconstruire et à se développer, et non à le détruire avec la folie et la barbarie de l’intervention militaire.
S’agissant des conflits diplomatiques entre le Niger et la France, cette dernière n’est nullement fondée à s’opposer au retrait de la qualité de l’ambassadeur de France au Niger. La convention de Vienne du 18 avril 1961, entrée en vigueur le 24 avril 1964, régit les relations diplomatiques entre les Etats. En son article 9, elle stipule que le pays accréditaire peut retirer le visa diplomatique à l’ambassadeur, chef de mission diplomatique du pays accréditant, le déclarer persona non grata, et exiger son retrait du pays accréditaire Le pays accréditant ne doit pas s’y opposer. Ce n’est donc pas le président Emmanuel Macron qui a accrédité son ambassadeur auprès du président Mohamed Bazoum, mais l’Etat Français qui a accrédité son ambassadeur auprès de l’Etat Nigérien. Aussi, la France connaît et s’adresse aux Etats et non aux régimes politiques de ces Etats. Aussi, l’Etat actuel du Niger déclare l’ambassadeur de France persona non grata et lui retire le visa diplomatique. La France ne peut donc pas s’y opposer, en vertu de la souveraineté internationale du Niger et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Il en est de même pour les militaires français se trouvant sur le territoire du Niger. Il convient de rappeler que les nations africaines jouissent de leur souveraineté internationale au même titre que les Etats-Unis, la Chine, l’Inde, la Russie, le Brésil, la Turquie, l’Iran et de nombreux autres pays, où la France ne peut pas exercer son chantage diplomatique et militaire pour imposer un régime politique ou décider de la légitimité des dirigeants politiques. Le droit international, la raison politique et le respect mutuel entre les peuples commandent que les dirigeants français respectent les nouvelles autorités du Niger soutenues par les Nigériens (le peuple, la jeunesse, les élus des collectivités territoriales). Il n’y a pas de sentiment anti-français en Afrique (peuples africains contre le peuple français), mais des manifestations des populations contre les dirigeants français et leur politique qui veulent s’imposer, imposer l’armée française aux Africains et décider des dirigeants africains et de leur légitimité en Afrique.
Emmanuel Nkunzumwami
Écrivain-Essayiste
Analyste économique et politique
Intervenant dans les médias Radios et TV
Directeur de NERES Conseil
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