Lettre du président Emmanuel Macron aux Français
13 janv. 2019Après deux mois de bras de fer entre les "Gilets Jaunes", représentant des mouvements de colère en France, et le gouvernement, à travers lequel les manifestants interpellent le président de la République, celui-ci a décidé de répondre en trois temps.
Le texte ci-dessous résume les évolutions entre les premières manifestations des Gilets Jaunes, samedi le 17 novembre 2018, et la publication de la lettre du président Emmanuel Macron aux Français, dimanche le 13 janvier 2019.
1°-Le 10 décembre 2018, lors de l'allocution télévisé, le président Emmanuel Macron a annoncé l'arrêt des augmentations de toutes les taxes, le versement d'un complément de salaire ou d'allocations aux revenus modestes, le relèvement du seuil de déclenchement de l'augmentation de la CSG (Contribution Sociale Généralisée) pour les retraités au-delà de 2000€ par mois, notamment. Mais, la colère n'est pas retombée, et les manifestations se sont poursuivies à travers toute la France. L'Avenue des Champs-Élysées et l'Arc-de-Triomphe sont alors devenus des lieux symboliques de rendez-vous, comme dans des arènes, entre les forces de l'ordre, les manifestants Gilets Jaunes et les casseurs. Il en a été ainsi également dans plusieurs villes de France.
2°-Le 31 décembre 2018, lors des vœux télévisés. Le président de la République a formé trois vœux pour 2019 pour le bien de la France et des Français : la vérité (notamment pour informer les citoyens de l'état du pays, de ses difficultés à se redresser, de la situation économique et financière, des demandes non solvables car incompatibles avec le fonctionnement des institutions et la situation du pays, etc.). Ensuite, il a formé un vœu de dignité, car les Français ne semblent pas mesurer leur capital politique, la force et l'universalité des initiatives de la France dans le monde, ses atouts et le rayonnement du pays. La France a des valeurs, un capital forgé par l'histoire et sa présence dans le monde, mais elle enregistre un fort niveau de doute d'elle-même et d'inquiétude. Il a enfin formé un vœu d'espoir. Le renouveau souhaité, le redressement engagé, les reformes en cours et la nouvelle dynamique politique impulsée par le renouvellement du personnel politique... devraient imprimer les raisons de l'espoir dans un meilleur avenir de la France. Il appelle l'effort de chacun pour bâtir une France plus dynamique, plus prospère, plus solidaire et plus attentive aux plus faibles. Il a donc annoncé l'ouverture d'un « Grand Débat National », qui sera lancé par une lettre aux Français.
3°-L'Ouverture du Grand Débat National, du mardi 15 janvier au samedi 16 mars 2019, à travers toute la France, dans toutes les mairies, avec une présidente nationale chargée d'animer ce grand débat et des référents dans chaque département. Le président Emmanuel Macron assure tenir compte de toutes les opinions qui seront exprimées dans ce Grand Débat National, avant la poursuite des réformes dans le pays.
Le lecteur trouvera le texte intégral de cette lettre aux Français, sous forme de pièce jointe en haut de cet article.
Il s’agit d’une longue lettre que le président a résumée dans une proposition de trente-deux questions auxquelles les Français pourront répondre librement. Elles sont précises, synthétisées et regroupées en quatre domaines : les impôts, les dépenses et l’action publique ; l'organisation de L’État et des collectivités publiques ; la transition écologique ; la démocratie et la citoyenneté.
« Pour moi, il n'y a pas de questions interdites. Nous ne serons pas d'accord sur tout, c'est normal, c'est la démocratie. Mais au moins montrerons-nous que nous sommes un peuple qui n'a pas peur de parler, d'échanger, de débattre », annonce le président de la République dans cette lettre.
I. -Les impôts et les services publics
1. Comment pourrait-on rendre notre fiscalité plus juste et plus efficace ?
2. Quels impôts faut-il à vos yeux baisser en priorité ?
3. Quelles sont les économies qui vous semblent prioritaires à faire ?
4. Faut-il supprimer certains services publics qui seraient dépassés ou trop chers par rapport à leur utilité ?
5. A l'inverse, voyez-vous des besoins nouveaux de services publics et comment les financer ?
6. Comment mieux organiser notre pacte social ? Quels objectifs définir en priorité ?
II. - L'organisation de l’État et des collectivités publiques
7. Y a-t-il trop d'échelons administratifs ou de niveaux de collectivités locales ?
8. Faut-il renforcer la décentralisation et donner plus de pouvoir de décision et d'action au plus près des citoyens ? A quels niveaux et pour quels services ?
9. Comment voudriez-vous que l'Etat soit organisé et comment peut-il améliorer son action ?
10. Faut-il revoir le fonctionnement de l'administration et comment ?
11. Comment l’État et les collectivités locales peuvent-ils s'améliorer pour mieux répondre aux défis de nos territoires les plus en difficulté et que proposez-vous ?
III. - La transition écologique
12. Comment finance-t-on la transition écologique : par l'impôt, par les taxes et qui doit être concerné en priorité ?
13. Comment rend-on les solutions concrètes accessibles à tous, par exemple pour remplacer sa vieille chaudière ou sa vieille voiture ?
14. Quelles sont les solutions les plus simples et les plus supportables sur un plan financier ?
15. Quelles sont les solutions pour se déplacer, se loger, se chauffer, se nourrir qui doivent être conçues plutôt au niveau local que national ?
16. Quelles propositions concrètes feriez-vous pour accélérer notre transition environnementale ?
17. Comment devons-nous garantir scientifiquement les choix que nous devons faire à l'égard de la biodiversité ?
18. Comment faire partager ces choix à l'échelon européen et international pour que nos producteurs ne soient pas pénalisés par rapport à leurs concurrents étrangers ?
IV. -Les institutions, la démocratie et la citoyenneté
19. Faut-il reconnaître le vote blanc ?
20. Faut-il rendre le vote obligatoire ?
21. Quelle est la bonne dose de proportionnelle aux élections législatives pour une représentation plus juste de tous les projets politiques ?
22. Faut-il, et dans quelles proportions, limiter le nombre de parlementaires ou autres catégories d'élus ?
23. Quel rôle nos assemblées, dont le Sénat et le Conseil économique, social et environnemental (Cese), doivent-ils jouer pour représenter nos territoires et la société civile ?
24. Faut-il les transformer et comment ?
25. Quelles évolutions souhaitez-vous pour rendre la participation citoyenne plus active, la démocratie plus participative ?
26. Faut-il associer davantage et directement des citoyens non élus, par exemple tirés au sort, à la décision publique ?
27. Faut-il accroître le recours aux référendums et qui doit en avoir l'initiative ?
28. Que proposez-vous pour améliorer l'intégration dans notre Nation ?
29. En matière d'immigration, une fois nos obligations d'asile remplies, souhaitez-vous que nous puissions nous fixer des objectifs annuels définis par le Parlement ?
30. Que proposez-vous afin de répondre à ce défi qui va durer ?
31. Comment renforcer les principes de la laïcité française, dans le rapport entre l’État et les religions de notre pays ?
32. Comment garantir le respect par tous de la compréhension réciproque et des valeurs intangibles de la République ?
La copie est attendue pour le 16 mars 2019. Et le président de la République conclut : « Vos propositions permettront donc de bâtir un nouveau contrat pour la Nation, de structurer l'action du Gouvernement et du Parlement, mais aussi les positions de la France au niveau européen et international. Je vous en rendrai compte directement dans le mois qui suivra la fin du débat ». Il a pris un engagement.
Emmanuel Nkunzumwami
Analyste économique et politique
Auteur de "La France inquiète face à son avenir" et de "La Conquête de l'extrême droite en France", aux Éditions L'Harmattan, 2016.
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