Malgré des plans de sauvetage financiers de la Grèce, celle-ci continue de s’enfoncer. Il est étonnant que de nombreux artistes ignorant les mécanismes de gestion soient montés au créneau avec « il faut sauver la Grèce. C’est notre civilisation ». Non seulement, ce type de slogan est inutilement irresponsable, mais il démontre que leurs auteurs n’aident pas les Grecs avec ces propos. Ils les traitent comme des enfants égarés. Mais, soyons clairs : de nombreux Grecs ont largement profité de la solidarité « aveugle » et « généreuse » de l’Europe. Ce n'est pas une question de « défense de civilisation européenne », mais une question de  « capacité de gestion publique » qui fait défaut à la Grèce. Que l'on arrête de manipuler les citoyens. Lorsque les Etats s'endettent pour aider la Grèce, ce sont les citoyens qui paient avec leurs impôts et taxes. Si ces artistes disposent de 320 milliards d'euros pour payer la dette publique grecque et lui imposer une rigueur de gestion ensuite, ce serait tout à leur honneur. Il y a une dette privée gérée par les banques européennes. Elles ont profité de la croissance grecque au début depuis son entrée dans l’Union européenne jusqu’aux années 2000, et elles ont prêté beaucoup d’argent aux banques grecques. Ces banques, associées à leurs filiales en Grèce, ont distribué du crédit aux entreprises et aux particuliers. Après les faillites et les difficultés financières consécutives à la crise internationale depuis l’été 2007, ces banques font face à des défauts de remboursements de leurs clients. Elles ont donc besoin d’argent. C’est ainsi que la spéculation s’est mise en place pour profiter des taux d’intérêt élevés demandés aux grecs « à profil risqué ». Les recapitalisations et les prêts de la BCE des grandes banques européennes ont servi à enfoncer davantage les Grecs surendettés. Le chômage croissant et massif, les baisses des salaires et des pensions, la faillite des entreprises ont amplifié les difficultés financières du pays. Quant à la dette publique, une partie a fui dans les corruptions et les évasions fiscales, les dépenses inconsidérées pour l’armée, les dizaines de milliards dépensés pour les jeux olympiques de 2004, une administration pléthorique et des fonctionnaires trop payés au regard des capacités de la Grèce, des dépenses sociales au profit des personnes décédées depuis longtemps. L’Etat a fait appel à l’Europe pour percevoir des aides et des prêts. Mais pour rembourser les prêts avec leurs intérêts, l’Etat et les collectivités publiques doivent lever l’impôt. Mais dans les principaux secteurs économiques de la Grèce, les acteurs ne paient pas d’impôts. Pour payer l’impôt sur les entreprises, il faut que celles-ci soient correctement immatriculées. Donc de nombreuses entreprises échappent à l’impôt, car inconnues des services fiscaux. Mais les sociétés immobilières, les agences de tourisme, les armateurs (la Grèce est devenue la première puissance maritime commerciale au monde, le pays où les armateurs du monde font immatriculer leurs navires pour profiter d’une fiscalité inexistante). Pour les collectivités, elle devraient lever les taxes et impôts locaux. Mais pour lever ces redevances, il faut des enregistrements cadastraux. Ou alors, il faudra sanctionner et taxer des résidences illégales. Mais sans fichier de cadastre, comment différencier les résidences et les propriétaires ? Il ne reste qu’une source de revenu fiable, c’est la TVA. Mais une partie disparaît dans la corruption des fonctionnaires fiscaux. Il en résulte que la Grèce perçoit bien des aides et des prêts de la troïka (Union européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire internationale), mais elle n’a pas mis en place les réformes et une administration capable de générer ou de recouvrer les fonds en vue de rembourser les prêts reçus et payer les intérêts de la dette.

1. Retour sur la chronologie :

       Le mercredi 29 juin 2011, le parlement vote par 155 voix contre 138 (des députés de la Nouvelle Démocratie conduits par Antonis Samaras qui a refusé également de participer à un gouvernement de coalition) de nouvelles mesures d’austérité conçues de « concert avec la Troïka des bailleurs de fonds » (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international). Ce plan prévoit de réduire la masse salariale des fonctionnaires pour un montant d’au moins 800 millions d’euros en 2011, et les dépenses de l’État de 100 millions d’euros. Il est également prévu une baisse des sommes allouées à la protection sociale, tandis que les rentrées fiscales devraient augmenter de 2,450 milliards d’euros. Ce vote rend possible le versement de sommes prévues dans le premier plan, et elles étaient liées à des conditionnalités ainsi que l’ouverture des négociations sur un nouveau plan de soutien à la Grèce. La question de la réalisation de ce plan d'austérité et de la rentrée des impôts pose à nouveau, de façon lancinante, la question de la solvabilité du pays.

  • Pour Lorenzo Bini Smaghi, membre du directoire de la Banque centrale européenne « La Grèce n’est pas insolvable si elle applique le plan d’assainissement qui comprend en particulier de nombreuses privatisations qui pourront réduire la dette ». On sent la démarche du Plan d'ajustement structurel qui a ruiné de nombreux pays africains au cours des années 1980. Mais la Grèce ne sait pas gérer...
  •  Pour Martin Wolf, les pays européens cherchent à gagner du temps et à protéger les banques. Il écrit « Permettre à Athènes de retourner sur les marchés grâce à une cure de rigueur est une illusion. Le but, c'est de gagner du temps ». Par ailleurs il souligne, à juste titre, qu’« il est beaucoup moins embarrassant de déclarer que l'on aide la Grèce, alors qu'on aide ses propres banques ». Pour lui, malgré les efforts du pays, le plan de 2010 « n’a pas réussi à rendre le pays à nouveau solvable ». En réalité, la Grèce n’est pas prête à se réformer culturellement, administrativement et fiscalement. C'est une question de gestion publique.
  • Pour Antoine Brunet d’AB marchés, « si la restructuration de la dette grecque avait été réalisée en octobre 2009, le risque systémique aurait sans doute été moins grand qu'aujourd'hui. Et si on attend un an de plus le risque sera plus grand ». On ne résout pas le problème structurel de fond.

 L’Accord du 21 février 2012 rappelle les fragilités structurelles :

Cet accord a pour vocation, pour l’essentiel, de rendre exécutable les accords de juillet et d’octobre. En somme, un accord pour l’exécution des accords précédents. Les négociations ont été difficiles à finaliser et les autres Européens, notamment les pays encore notés AAA (Allemagne Pays-Bas, Finlande) par les agences de notation, ont sérieusement pensé à la sortie de la Grèce de la zone euro. Parmi les sujets de tension, l’on peut citer :

  • Le manque de confiance des autres pays envers la volonté des politiques grecs de réellement réaliser les réformes auxquels ils se sont engagés. Les autres pays européens, notamment les pays notés AAA insistent sur les points où la Grèce n’a pas tenu ses engagements. Par exemple : 30.000 fonctionnaires devaient être transférés à une « structure de réserve » avant fin 2011. Or, ce mouvement n’a touché que 1.000 personnes. De même aucune des 10 professions qui devaient être dérégulées ne l’a été, et la « libéralisation des horaires [ … ] d’ouverture des pharmacies a été rejetée par le parlement ».
  • La proximité d’élections qui pousse à douter de la fiabilité des négociateurs grecs et à demander à tous les grands partis grecs des engagements écrits.
  • Enfin les autres pays voient leur patience mise à rude épreuve par « l’attitude brouillonne et de chantage permanent » des dirigeants grecs.
  • De leur côté les Grecs sont confrontés à une baisse de leur niveau de vie et à des problèmes internes. Ils résistent aux réformes par leur parlement et par les manifestations régulières contre les réformes proposées.

Les grandes lignes de l’accord sont notamment :

  • le plan d’aide s’élève à 130 milliards pour les créanciers publics (principalement pays de la zone euro et pour un montant non défini encore par le FMI). Mais cette enveloppe à la demande des pays triple AAA pourrait être revue et sa réalisation est conditionnée par deux critères.
    • La finalisation de la restructuration de la dette privée.
    • La mise en place « d'ici à la fin février une liste d’actions préalables : baisse du salaire minimal, réforme du marché du travail etc. ».
  • Les créanciers privés acceptent une réduction de 53,5 % de leurs créances pour un montant de 107 milliards d’euros. Les banques françaises devraient être impactées pour un montant de 13 milliards d’euros. Les nouvelles obligations émises dans le cadre de ce programme seront de droit anglais et les litiges entre l’État grec et les créanciers privés sera arbitré au Luxembourg.

 

2. L’accord du 27 novembre 2012 ne fait que préciser les conditions des prêts :

       À la suite de la campagne électorale et des élections du printemps 2012, la Grèce a pris du retard dans l’application de son programme des réformes, d’autant que la conjoncture économique n’a pas été bonne. Aussi, le pays a été obligé de demander une nouvelle aide. L’accord a été difficile à obtenir car le FMI exigeait un abaissement de la dette à 120 % du PIB en 2020. Cela aurait impliqué que les États européens abandonnent une partie de leurs prêts consentis à la Grèce. Or, cela aurait obligé que pour payer les emprunts contractés pour accorder ces prêts, les autres pays européens sollicitent leurs contribuables ce qu'ils ne devaient surtout pas faire pour ne pas alourdir leur propre dette publique. Aussi pour éviter un défaut de paiement pour la Grèce, ils ont préféré adopter un objectif de 124 % du PIB en 2012 ; et pour y arriver, ils ont adopté une « combinaison de mesures : moratoire de dix ans sur les taux d'intérêts des prêts consentis par le fonds de secours, nouveaux délais de remboursement, baisse des taux sur les prêts bilatéraux du premier plan d'aide, ou rachat de dette par la Grèce ». Parallèlement une aide de 34,4 milliards d’euros sera versé en décembre 2012, suivi de 12 milliards par tranches en 2013. Mais, ces versements sont conditionnés à la poursuite du plan de réformes qui sont toujours bloquées par les Grecs et leurs dirigeants.

       Il convient de rappeler que l’économie de la Grèce était l’une des plus dynamiques de la zone euro de 2000 à 2007, avant la crise internationale, avec un taux de croissance de 4,2 % grâce notamment à l’apport de capitaux étrangers. Ceux-la même que les Grecs ne peuvent plus rembourser aujourd’hui. Une économie dynamique et une baisse inadaptée des taux d’intérêts (grâce à son entrée dans la zone euro) permettaient à la Grèce de financer d’importants déficits structurels. Néanmoins, depuis son entrée dans la zone euro, la dette publique grecque a toujours été supérieure à 100 % du PIB. Ses deux principaux secteurs économiques, le tourisme et le transport maritime, ont été sévèrement affectés et ont vu leur revenu chuter de 15 % en 2009.

       Le taux de chômage en Grèce s’est élevé à 10,3 % au quatrième trimestre 2009 contre 7,9 % un an plus tôt. Les jeunes entre 15-29 ans ainsi que les femmes sont les plus touchés avec un taux respectif de 20,4 % et 14 %, soit près du double de celui des hommes. La situation socioéconomique s’est très particulièrement dégradée depuis 2010, après la dépression générale des économiques européennes en 2009.  En Grèce, la dette publique s’élevait à 142,5 % du PIB à la fin du premier trimestre 2011, et elle a atteint 158 % du PIB à la fin de 2011, avec une dette d’un montant de 350 milliards d’euros. Aujourd'hui, c'est 321 milliards d'euros de dette publique, soit 177% du PIB grec, et avec un chômage généralisé de 25,6%. Or, pendant très longtemps, les prêts des banques, faits à des taux ne tenant pas compte des risques propres à la Grèce, n’ont pas envoyé des signaux adaptés au pays. Mais, des plans d'austérité aussi draconiens ont-ils la chance d’atteindre leur but de sortie de crise de la Grèce ? D’après le journal économique, Les Échos du 3 mai 2015, deux pays ont réussi une telle politique : la Suède dans les années 1990 et le Canada entre 1995 et 1998, mais sans que cela affecte de façon critique leurs programmes sociaux. Toutefois, il existe deux différences majeures. D’une part, ces pays s'étaient imposé ces mesures volontairement et donc les avaient acceptées. D’autre part, dans le cas particulier de la Suède, ce pays avait vu sa monnaie se déprécier, ce qui l’avait aidé. Or la Grèce ne peut pas laisser sa monnaie se déprécier car c’est une monnaie de la zone euro ; par contre, elle peut éventuellement sortir de la zone Euro pour tenter de suivre l’exemple de la Suède. Déjà dès 2010, certains économistes ont commencé à avancer que, face à l’ampleur de la dette et à l'importance de la charge des intérêts, la seule issue pour la Grèce serait de sortir de la zone euro, et de dévaluer, seule solution, selon ces auteurs, permettant de redonner un souffle à son économie et de repartir sur de bonnes bases. Les positions allant dans ce sens ont augmenté en 2011 à mesure que les problèmes du pays s'accroissaient.

      Les économistes européens ne cachent plus leurs positions d'experts. Wilhelm Hankel, professeur émérite d'économie à l'université de Francfort, soutient dans un article du célèbre Financial Times que la meilleure solution à la crise de la dette publique grecque eût été une sortie de la zone euro, suivie d’une dévaluation. Pour lui, l’austérité ou la sortie de la zone euro sont les deux solutions possibles pour faire face à des différences de taux sur les obligations de la dette publique. Pour cet économiste, si la Grèce reste dans la zone euro, alors les taux d’intérêt élevés liés aux déficits budgétaires pèseront sur la demande et freineront l’économie. Tout est dit avec clarté. Pour l’économiqte français Jacques Sapir (en mai 2010), il ne fait pas de doute que la Grèce va faire défaut. Cet économiste français ne perçoit dans la dévaluation qui suivrait la sortie de l’euro aucune catastrophe, mais un moyen pour le pays de retrouver sa compétitivité eu égard à sa structure économique.

La situation de la Grèce est toute particulière au sein de l’Union européenne :

      Selon une étude britannique, on constate depuis le début de la crise « des tendances très inquiétantes, un doublement des cas de suicides, une hausse des homicides, une augmentation de 50 % des infections au virus HIV et des gens qui disent que leur santé a empiré mais qu’ils ne peuvent plus consulter de médecins même s’ils devraient le faire ». Faute de moyens de subsistance, le recours à la prostitution est également en augmentation.

Avec la succession de plans d’austérité pour réduire les déficits publics, plusieurs centaines de milliers de Grecs, en précarité ou au chômage, n’ont plus les moyens de se soigner et les médecins bénévoles sont débordés. Certains patients ont dû réduire leurs dépenses de base, comme le chauffage ou la nourriture pour pouvoir continuer à suivre leurs traitements médicaux…un véritable paradoxe ! On rapporte également que faute de moyens, certains hôpitaux en viennent à emprunter à d’autres hôpitaux du matériel médical, ou même à demander à leurs patients de l’acheter eux-mêmes. En raison d’une trésorerie insuffisante ou d’un manque de personnel, des hôpitaux ont dû fermer ou arrêter temporairement leurs activités dans tout le pays.

En 2012, la compagnie pharmaceutique allemande Merck a annoncé qu’elle ne livrerait désormais plus le médicament anticancéreux Erbitux aux hôpitaux publics grecs, en raison de leurs difficultés de paiement.

En juillet 2013, un projet de loi sur le licenciement de fonctionnaires et l’ouverture des magasins le dimanche était à l’étude par la coalition gouvernementale (Nouvelle Démocratie (droite)-Pasok (socialiste)), malgré deux journées de grève générale et la menace d’excommunication des parlementaires favorables à la loi par l’Église grecque. Encore un frein culturel inadapté dans une Union européenne moderne. Cependant, à la même période, le chômage frôlait les 27 %, alors que 35 % des salariés avaient des arriérés de salaire de plusieurs mois.

3. Comment la Grèce en est-elle arrivée à cette sombre situation : rappel des événements.

En 2009

  • Octobre : après des élections, un nouveau gouvernement grec est élu. Il est dirigé par le PASOK qui a obtenu 43,92 % des suffrages et 160 des 300 sièges du parlement grec.
  • 5 novembre : les premières estimations du budget font apparaître un déficit de 12,7 % du PIB, le double de ce qui était initialement annoncé.
  • 8 novembre : le projet de budget 2010 vise à ramener le déficit à 8,7 % du PIB. Il prévoit aussi que la dette grecque atteindra 121 % du PIB en 2010 contre 113,4 % en 2009.
  • 8 décembre : Fitch Ratings dégrade sa note financière pour la Grèce de A- à BBB+.
  • 16 décembre : Standard & Poor's abaisse sa note de A- à BBB+.
  • 22 décembre : Moody's abaisse sa note de A1 à A2.
  • Le pays termine l’année 2009 en très mauvaise appréciation.

2010

  • 14 janvier : pour respecter le pacte de stabilité et de croissance la Grèce prévoit de ramener son déficit à 2,8 % du PIB en 2012. Même les dirigeants grecs n’y croient pas eux-mêmes. Ils adoptent le mensonge et la manipulation politique pour obtenir des aides et des prêts internationaux.
  • 2 février : le gouvernement étend le gel des salaires publics à ceux qui gagnent moins de 2 000 euros par mois.
  • 24 février : une grève générale d'un jour contre les mesures d'austérité touche le secteur public et les transports
  • 5 mars : nouvelles mesures d'austérité destinées à économiser 4,8 milliards d’euros avec notamment une augmentation de la TVA qui passe à 21 %, une réduction de 30 % des primes du secteur public, le gel des pensions, et une augmentation des taxes sur l’essence, le tabac et l’alcool.
  • 11 mars : grève dans les secteurs public et privé.
  • 15 mars : les ministres des finances se mettent d'accord sur un mécanisme d’aide à la Grèce mais restent muets sur les détails. Un silence déjà gêné !
  • 19 mars : José Manuel Barroso presse les pays de la zone euro de mettre au point un train de mesures d'aide à la Grèce. Etait-ce la bonne solution ?
  • 25 mars : Jean-Claude Trichet déclare que la Banque centrale européenne acceptera comme collatéral des obligations grecques notées BBB- (auparavant, la limite inférieure était A-) jusqu’en 2011. Il ne prévoit pas que la crise dure ou même s’aggrave ? Les Européens (Union européenne et Banque centrale européenne semblent muets, sourds et aveugles.
  • 11 avril : les responsables politiques des pays de la zone euro se mettent d’accord sur un plan d’aide à la Grèce qui repose sur des prêts bilatéraux (durée trois ans, taux d'intérêt environ 5 %) d’un montant de 30 milliards d'euros. Les prêts seront accordés par les pays au prorata de leur participation au capital de la BCE.
  • 13 avril : la BCE apporte son soutien au plan d'aide à la Grèce.
  • 23 avril : la Grèce demande officiellement l'activation du plan d'aide. Un marché de dupes se met ainsi progressivement en route.
  • 1er mai : manifestation de protestation contre les mesures d'austérité à Athènes.
  • 2 mai : la Grèce annonce son quatrième plan d'austérité.
  • 3 mai : « la Banque centrale européenne annonce qu'elle acceptera les obligations de la dette publique grecque comme collatéral quelle que soit sa note ». Les exigences tombent en faveur de la Grèce.
  • 5 mai : troisième grève générale depuis février. À cette occasion, une manifestation dégénère et cause la mort de trois employés d'une banque incendiée par des cocktails Molotov.
  • 7 mai : après plusieurs semaines de débats, le Conseil européen valide le plan d'aide à la Grèce de 110 milliards de prêts sur 3 ans. Pour mémoire, ce prêt était de 30 milliard le 11 avril (soit un mois plus tôt).
  • Nuit du 9 au 10 mai 2010 : pour faire face à la peur des marchés et éviter que la crise grecque ne s'étende à l'Espagne, au Portugal voire à l'Italie, l'Union européenne en coopération avec le FMI se dote d'un fonds de stabilisation de 750 milliards d'euros (La commission européenne est autorisée à emprunter 60 milliards d'euros, 440 milliards sont apportés par les États et 250 milliards par le FMI). La Grèce éprouve déjà la solidité et la solidarité de l’Europe.
  •  8 juillet sixième grève générale de l'année pour protester contre le plan d'austérité.

2011

  • 15 janvier : la banque centrale d'Irlande fait savoir qu'elle a procédé, depuis septembre, à diverses opérations de refinancement des banques commerciales sans contrepartie, pour environ 50 milliards d'euros. Ces opérations se caractérisent par de la création de monnaie scripturale, avec le consentement officiel de la BCE et en conformité avec les traités européens. Ces mesures exceptionnelles sont liées à une fuite importante des dépôts bancaires irlandais vers l'étranger depuis plusieurs mois.
  • 25 janvier : le Fonds européen de stabilité financière (FESF) effectue ses premières émissions d'obligations avec succès. L'opération a permis de lever près de 5 milliards d'euros, pour plus de 45 milliards proposés par les marchés.
  • 23 février. Grève générale en Grèce pour protester contre l'austérité.
  • 12 mars. Sommet européen où, en échange d'une accélération de son programme de privatisations, les chefs d’Etats et de gouvernement européens décident que la Grèce devrait voir la durée des emprunts octroyés par les pays européens passer de 4,5 ans à 7,5 ans et les taux passer à 4,2 % contre 5,2 % initialement. Sera-ce suffisant dans l’état de désintégration économique et financière de la Grèce.
  • 13 juin, Standard & Poor's abaisse la note grecque à CCC, estimant que le pays pourrait restructurer sa dette d'une façon qui pourrait être assimilée à un défaut. Déjà en 2011, les spécialistes envisagent un défaut de paiement.
  • 19 et 20 octobre, treizième grève générale, de 48 heures. Des heurts entre militants communistes et militants antiautoritaires causent la mort d'un syndicaliste du PAME.
  • 27 octobre plan d'aide qui prévoit un abandon par les banques privées de 50 % de la dette publique qu'elles détiennent sur la Grèce, en échange d'une recapitalisation pour un montant de 106 milliards d'euros.
  • 31 octobre, le Premier ministre Papandréou annonce un référendum sur le nouveau plan d'aide européen d'aide décidé le 27 octobre.
  • 4 novembre, le ministre des Finances annonce l'abandon du projet de référendum, Papandréou s'engageant à démissionner après un vote de confiance prévu le soir même au Parlement.

2012

  • En janvier, une action « contre l'austérité et la réforme du marché du travail » rencontre peu d'échos parmi les salariés du secteur privé, mais plusieurs partis anti-austérité semblent se renforcer : SYRIZA, KKE, DIMAR… Parallèlement le pays a besoin de 99 milliards d'euros (environ 30 milliards utilisables pour les négociations avec les créanciers privés, 30 à 40 milliards pour recapitaliser les banques et 29 milliards pour faire face au service de la dette). La Grèce entre dans le cercle vicieux du surendettement : elle contracte des emprunts pour rembourser d’autres emprunts arrivés à échéance.
  • 12 février : Le parlement grec vote un nouveau plan d'austérité « en préalable au déblocage du deuxième plan de sauvetage du pays », pendant qu'entre 80.000 et 160.000 manifestants protestent dans la violence contre le vote et les mesures préconisées par le FMI et l'Union européenne. Le lendemain (lundi 13 février) on annonce la tenue d'élections législatives anticipées dès avril 2012 alors que le mandat du gouvernement pouvait durer jusqu'à octobre 2013. Pour trois ministres allemands Wolfgang Schäuble, Guido Westerwelle et Philip Rösler, « les promesses de la Grèce ne nous suffisent plus. Ils doivent, lors d'un nouveau programme, d'abord mettre en œuvre les parties de l'ancien programme et économiser ». Pour Philip Rösler, « le jour J (de sortie de la Grèce de la zone euro) fait de moins en moins peur ».
  • 21 février : nouveau plan de sauvetage de 130 milliards d’Euro. Il convient de rappeler que ce montant avait été estimé à 30 milliards seulement le 11 avril 2010.
  • 6 mai : Des élections législatives anticipées conduisent à un désaveu cinglant des 3 seuls partis à avoir soutenu les divers plans d'austérité PASOK, ND et LAOS. Les deux premiers passent d'un total de 77% des suffrages exprimés à 32% (13 + 19). Le dernier n'atteint même pas les 3% nécessaires pour conserver des députés.
  • 16 mai : Aucun gouvernement politique ne parvient à être mis en place, les deux partis ayant accepté les conditionnalités liées aux plans de sauvetage (parfois qualifiés de pro-austérité) ne disposant pas de la majorité absolue. Un gouvernement intérimaire est confié au président du Conseil d'État, dans l'attente de nouvelles élections programmées pour le 17 juin. Les difficultés économiques et financières se répercutent dans l’instabilité institutionnelle de la Grèce.

2013

  • Le 5 juin, le FMI fait son mea culpa par la voix de Christine Lagarde (nouvelle directrice générale du FMI), admettant que le premier plan de sauvetage de la Grèce s'était soldé par des « échecs notables » en raison notamment de désaccords avec ses partenaires européens au sein de la « troïka » ; « la confiance des marchés n’a pas été rétablie (…) et l'économie a été confrontée à une récession bien plus forte que prévu ». Les projections de dette publique grecque établies par le Fonds ont elles aussi été balayées « dans une très large mesure », reconnaît l'institution.
  • Le 11 juin, le gouvernement annonce la fermeture de l’ERT (Ellinikí Radiofonía Tileórasi).
  • Le 13 juin, plusieurs dizaines de milliers de personnes (20.000 selon les organisateurs) protestent à Athènes devant le siège de l’ERT mais aussi dans d’autres villes contre la fermeture de la radio télévision publique annoncée par le gouvernement.

2014

Le 8 décembre, après plusieurs mois de stabilité politique, le premier ministre prend la décision d'avancer l'élection présidentielle, prévue en mars 2015, en décembre 2014 dans le but de vouloir lever l'incertitude financière de la Grèce lors des négociations avec la Troïka (Fonds monétaire international, Banque centrale européenne et Commission européenne) au sujet de la dette financière grecque qui aura lieu au début de l’année suivante.

Le 19 décembre l'élection présidentielle anticipée de 2014, à haut risque politique, est entachée d'une tentative de corruption.

2015

  • Les élections législatives du 25 janvier portent au pouvoir le parti de gauche radicale anti-austérité Syriza, avec 36,34 % des voix et 149 députés sur 300. Ce vote est un désaveu cinglant pour la droite du Premier ministre sortant, Antónis Samarás, mais également pour le Pasok, parti de gauche historique du paysage politique grec, avec lequel il a gouverné depuis juin 2012.
  • Le 4 février, la BCE annonce la suspension du régime dérogatoire de refinancement qu’elle accordait aux banques grecques. C’est le début de la course aux surenchères pour les dirigeants grecs.
  • Le 12 février, La BCE porte le plafond des avances d'urgence aux banques grecques à 60 milliards.
  • Le 18 février, La BCE porte à 68 milliards d’Euros le plafond des avances d'urgence en liquidités aux banques grecques.
  • Le 22 avril,  la Banque Centrale Européenne porte à 75,5 milliards d'euros le plafond des aides d'urgences aux banques grecques.
  • Le 19 juin, La BCE porte à 84 milliards d'euros le plafond des avances d'urgence aux banques grecques.
  • Le 27 juin 2015 à minuit, le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, annonce la tenue d'un référendum sur l'acceptation ou non du plan proposé par les créanciers.
  • Le 30 juin, le FMI constate un défaut de paiement de la Grèce pour le remboursement attendu de 1,6 milliard d’euros. Désormais, toutes négociations sur la dette grecque ne seront reprises qu’après le référendum des Grecs prévu pour dimanche le 4 août 2015.
  • Le 03 juillet  Fonds européen de stabilité financière (FESF) déclare officiellement la Grèce en « défaut » de paiement, après le non-remboursement par Athènes de 1,6 milliard d'euros au FMI, mais sans conséquence financière immédiate. Le non-remboursement grec, mardi 30 juin 2015, « résulte en un défaut par la Grèce, aux termes de l'accord financier entre la Grèce et le FESF », a indiqué l'institution dans un communiqué. Mais le FESF se réserve le droit d'agir ultérieurement, « sans réclamer de remboursement immédiat » à Athènes ni renoncer à ses créances.
  • Cette option est celle qui était attendue, avant le référendum de dimanche en Grèce sur les propositions des créanciers du pays, BCE, UE et FMI. « Ce défaut est une cause de grave inquiétude. Cela rompt l'engagement pris par la Grèce d'honorer ses obligations financières et ouvre la voie à de sévères conséquences pour l'économie et le peuple grec », a déploré le président du FESF, Klaus Regling, cité dans le communiqué.
  • En pratique toutefois, le FESF, le plus gros créancier du pays avec des prêts totalisant 144,6 milliards d'euros, a opté pour l'attentisme. Il précise « garder ainsi toutes les options ouvertes » en fonction des évolutions en Grèce. Le FESF déclare qu’il « suivra en permanence la situation et évaluera régulièrement sa position », ajoute le communiqué. Le non-remboursement par la Grèce de la tranche due au FMI à la date du 30 juin « n'a aucune influence sur la capacité du FESF à rembourser ses détenteurs d'obligations », grâce à « sa structure de garantie très solide », précise le communiqué.
  • Le 4 août, la Bulgarie pourfend une Grèce qui, selon elle, profite de l'argent de l'Europe sans accepter de faire les réformes attendues. Déjà, tout au début de la crise grecque, en 2010, l’éditorialiste d’un grand quotidien bulgare se déchaînait : « Je ne m’inquiète pas pour les Grecs : ils continueront à recevoir de l’argent de l’Union européenne, à jouer au backgammon et à boire de l’ouzo à longueur de journée alors que nous [les Bulgares], on ira cueillir leurs olives et leurs oranges pour une bouchée de pain ».

Cinq ans plus tard, ce 25 juin 2015 à Bruxelles, le premier ministre bulgare, Boïko Borissov, du parti GERB (centre-droit), est à peine plus diplomate : « Arrêtons de perdre du temps sur la Grèce, cela fait des années que cela dure. Et tout ce que j’entends est qu’ils veulent plus d’argent mais qu’ils rechignent à faire des réformes. Qu’ils fassent leurs réformes ou qu’ils en assument les conséquences ! ». Et le chef du gouvernement bulgare d’enfoncer le clou, citant les efforts de son pays pour réduire le déficit public et la dette selon les critères de Maastricht :

« Nous aussi, nous voulons donner plus pour les salaires et les retraites. Qui ne le voudrait pas? Mais nous respectons la discipline financière ».

Le premier ministre bulgare s'est érigé en porte-parole des pays de l'UE qui ne veulent pas faire de concessions à Athènes parce que, dit-il, « les plus pauvres [comme les Bulgares] sont obligés de payer pour les plus riches [les Grecs] ».

Sofia applique, depuis une grave crise financière en 1996-97, un régime d'austérité draconien sous l'égide du Fonds monétaire international. Ce régime lui vaut d'arborer une des plus faibles dettes publiques de l'UE.

En Bulgarie, la situation politique et économique est le miroir inverse de la Grèce. Alors qu''à Athènes l'oligarchie est à droite, en Bulgarie, les communistes, devenus "socialistes", se sont transformés en une "oligarchie rouge", des capitalistes "de gauche" très puissants.

Mais, toute considération politique mise à part, les opinions de Borissov reflètent assez bien l'état d'esprit de la population de Bulgarie (près de 7 millions d'habitants), le membre le plus pauvre de l'UE. En Bulgarie, le salaire minimum et la retraite moyenne sont de 180 euros.

En Grèce voisine, malgré l'austérité, la retraite moyenne est près de 600 euros et le salaire minimum (même réduit) à 580 euros. Beaucoup de Bulgares ont le sentiment de vivre en crise permanente depuis 25 ans, depuis la chute du communisme en 1990, et non pas depuis cinq ans comme les Grecs. Ils sont exaspérés par la "saga athénienne".

Pour illustrer les propos de ces Bulgares, revenons à la Grèce :

dans leur traque aux fraudeurs fiscaux, les autorités grecques ont découvert que 8.500 retraités, âgée entre 100 et 110 ans, perçoivent une retraite. Une situation considérée comme bizarre car le pays ne compte pas autant de centenaires. Déjà en 2008, le pays ne comptait que 2.665 centenaires, selon les chiffres officiels suspects de fraude. Tout à leur tâche pour redresser les finances désastreuses du pays, les autorités grecques traquent les fraudeurs fiscaux en épluchant notamment toutes les dépenses des caisses de retraites. Dans ces étranges découvertes, elles se sont également rendu compte que 321 personnes décédées continuaient à percevoir leur pension post mortem. «Nous avons découvert qu'une retraite était versée à une personne décédée en 1999 et recensé des cas de pensions versées à des personnes mortes il y a cinq ou sept ans », a déclaré le vice-ministre du Travail, Georges Koutroumanis. Une interrogation s’installe : « Comment les retraités de plus de 100 ans ont-ils pu tripler en deux ans seulement ? » s'étonne un conseiller du ministre. Intrigué, le gouvernement va pousser ses investigations en contrôlant la situation de 20.000 personnes de plus de 95 ans d'ici au mois d'octobre. Il s'attaquera ensuite très vite aux quelque 30.000 Grecs percevant une pension d'invalidité susceptible d'être injustifiée. Avec probablement de nouvelles surprises en perspective. Pendant ce temps, les corruptions continuent, la dette s’accumule et les difficultés financières s’aggravent. L'Europe est-elle prête à aider continuellement la Grèce pendant des dizaines d'années ? En a-t-elle les moyens ?

Emmanuel Nkunzumwami

Analyste économique et politique

La sortie de la Grèce de la zone euro est inéluctable : la dette grecque commence à révolter les Européens !
La sortie de la Grèce de la zone euro est inéluctable : la dette grecque commence à révolter les Européens !
La sortie de la Grèce de la zone euro est inéluctable : la dette grecque commence à révolter les Européens !
Retour à l'accueil