Les Gilets Jaunes ont mis en lumière les fragilités globales françaises, d'une part, et les relations compliquées entre les dirigeants, le peuple et les stratégies économiques, d'autre part.

     Les six moteurs de l'économie française sont en mauvais état depuis bien longtemps ; le président E. Macron a donc hérité d'un pays ruiné. En amont : l'éducation de la jeunesse s'est enlisée dans des idéologies gauchistes, égalitaristes, sans ambition d'excellence. Les enfants ne sachant ni lire, ni écrire parviennent au collège. Ensuite, tous les jeunes devront avoir leur bac. C'est un principe pour 80% d'entre eux, indépendamment des niveaux de connaissances ou de performance. L'éducation solide et exigeante, la recherche, les performances éducatives et l'innovation ne concernent que 8% des élèves des grandes écoles et des sciences médicales. Les autres formations sont devenues des hangars d'attente vers le chômage. Cela dure depuis plus de 40 ans en France ! L'innovation,  et la Recherche & développement découlent de l'éducation comme socle des savoirs. Les plus ambitieux, pour se réaliser pleinement, ont quitté la France pour être mieux reconnus ailleurs et réussir leurs rêves. Un deuxième moteur est donc en panne. L'investissement manque cruellement de capitaux privés, alors que l’État surendetté n'a plus les moyens de ses interventions. Mais, pourquoi et comment en est-on arrivé à ce niveau de carence, alors que de nombreuses entreprises ont renoué avec les bénéfices ? C'est le troisième moteur en panne.

     En aval, le moteur du commerce extérieur français est rouillé depuis 2002. Personne n'est parvenu à le réparer à ce jour. Alors, nous avons trouvé des bouc-émissaires commodes : perte d'influence dans le monde, comme si la terre entière devrait se mettre à genoux pour la France, manque de compétitivité à l'international ! Mais, les produits des Américains, des Suédois, des Allemands... Et même des Anglais sont plus chers, mais les excédents commerciaux s'améliorent chaque année dans ces pays. Même dans la consommation domestique, les parts de marchés des produits et services français se sont dégradées, quand certains produits n'ont pas purement et simplement disparu. La consommation intérieure suit la stagnation de l'investissement privé. Pas assez de revenu disponible, donc pas de pouvoir d'achat, et donc pas de consommation conséquente pour absorber notre production. En conséquence, la production intérieure stagne depuis 2007. Et comme la dette augmente plus vite que cette production tous les ans, le ratio de la dette sur le PIB augmente tous les ans. Et comme la production intérieure stagne, les créations nettes d'emplois stagnent également... Et donc les offres nettes d'emplois stagnent et le taux de chômage fait de la résistance aux environs de 10%. C'est le cercle vicieux permanent. "La France s'inquiète face à son avenir", et le peuple descend dans les rues et occupe les ronds points pour se faire entendre. Mais, y'a-t-il des solutions ? Bien sûr. En assumant des positions sociales-libérales, nous avons des stratégies à développer pour faire renaître l'espoir.

1-Contre les faibles revenus en France, nous avons des mesures pour les 18 millions de retraités et les 23 millions d'actifs. Les pensions des retraites sont inférieures à 2000€ pour 70% de familles de retraités. Sachant qu'ils s'occupent aussi des enfants au chômage et des petits-enfants de leurs enfants en difficultés financières, tout nouvel impôt et toute nouvelle taxe abaissent mécaniquement les revenus disponibles des trois générations. Il n'appartient pas à l’État de gérer ces relations. Il faudrait plutôt augmenter les niveaux des pensions nettes jusqu'à au moins 2200€ pour 40%. Le minimum retraite devrait atteindre 1100€ pour toutes les personnes ayant travaillé plus de 40 années en France ou pour la France, et ce dès le 1er janvier 2020. Pour cette catégorie importante des personnes retraitées, la France accroît des capacités de consommation intérieure. Les réductions des dépenses inutiles ou injustifiées de l’État et une partie de l'IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière) devraient être utilisées pour relever le niveau des pensions de retraite. Ainsi, nous avons un marché de 18 millions de consommateurs intérieurs, non délocalisables. Déjà en 2008, les 650 millions de trop perçu fiscal sur les grandes fortunes auraient dû être injectés dans le relèvement des pensions de retraite pour redresser l'investissement privé et la consommation, au lieu de les reverser aux milliardaires qui n'en avaient nullement besoin.

2-Pour les 23 millions d'actifs, l'on devrait rapidement mettre en œuvre la "promesse Sarkozy" qui n'a jamais été appliquée. Il s'agit des mesures d'encouragement de la "valeur travail" et la distribution équitable des bénéfices des entreprises. Les dividendes distribuables doivent être bloqués à 40% pour les actionnaires. Ce taux a été de 68% en 2017 en France contre 45% aux États-Unis. Les arguments farfelus de rétention des actionnaires pour stabiliser l'actionnariat, ne résistent pas aux réalités et aux analyses, car l'environnement économique français reste attractif. Sinon, les 60% restants distribuables à 30% pour les salariés et 30% pour l'autofinancement de l'entreprise pourraient se substituer en partie aux actionnaires défaillants ou des spéculateurs volatils. Ainsi, l'on pourrait même favoriser les prêts inter-entreprises ou multiplier des actionnariats croisés entre des entreprises en France pour consolider certains secteurs, afin de résister ensemble aux assauts de la concurrence extérieure. Tous les acteurs au sein des entreprises sont donc ainsi reconnus comme générateurs des activités, des richesses et de la croissance de leurs entreprises. Depuis le 1er janvier 2019, le SMIC vient de franchir le seuil de 10€ par heure. Des heures supplémentaires non chargées et non taxées étaient une bonne initiative pour que les efforts des salariés soient récompensés ; mais si tous les salaires sont relevés et le travail mieux rémunérés, les salariés n'auront plus besoin de recourir aux heures supplémentaires pour boucler les fins de mois. Ce dispositif ne peut donc qu'être incitatif au travail, mais surtout transitoire. Il faut reconnaître que le manque à gagner pour la collectivité publique, perdu dans les taxes, impôts et cotisations sur ces heures supplémentaires, est une subvention déguisée pour les entreprises et un versement d'allocations pour les salariés. Sans contrôle régulier de l'Autorité publique, comme cela arrive souvent en France, certaines entreprises seraient tentées d'instituer frauduleusement des heures supplémentaires non chargées et non taxées pour échapper aux obligations financières envers l’État, en s'achetant une bonne sympathie auprès des salariés bénéficiaires. Ce système transitoire doit être remplacé par des salaires décents et équitables. Ainsi, la France rémunère mieux ses salariés, reconnaît les compétences de ses salariés, accroît le pouvoir d'achat global et relance la consommation et les investissements privés. Il faut le faire vite et dès maintenant pour donner un nouveau souffle à l'espoir. C'est l'équité économique qui créera les richesses partagées à la hauteur des efforts de chacun. Les richesses des entreprises ne se créent pas toutes seules. Et c'est une incroyable erreur entretenue depuis longtemps par les tenants d'un capitalisme irresponsable et profiteurs d'un système à bout de souffle qu'ils entretiennent jalousement, de croire que ce sont les seuls dirigeants qui créent ces richesses pour se partager les grosses rémunérations directes et indirectes des entreprises. L’État détient un rôle central dans les Orientations des politiques publiques, dans les Régulations et les réglementations, et le Contrôle et les sanctions contre les déviants. Il a tous les outils de souveraineté pour cela. C'est le principe ORC qui s'applique à toutes les nations.

3-Quant à l’État et ses institutions, nous avons déjà indiqué les poches à percer pour baisser les dépenses de privilèges inutiles. Le Parlement devrait passer de 925 à 525 députés et sénateurs (400 députés et 125 sénateurs). Les effectifs de fonctionnaires de ces institutions sont tenus à la baisse, et rémunérés selon les charges accomplies et non selon les niveaux de privilèges acquis. Toute la fonction publique est amaigrie, et dimensionnée aux tâches réelles, avec la revue des rémunérations. Un ministre ou un haut fonctionnaire perçoit son salaire et se débrouille pour se loger comme tous les autres salariés, en dehors des fonctions d'astreinte ou de regroupements impératifs pour des raisons de service ou de sécurité nationale. Si la dynamique des emplois et des salaires dans des entreprises est retrouvée, certains fonctionnaires compétents pourraient trouver leurs activités dans le secteur privé. L’État pourrait ainsi délester la fonction publique de celles et ceux qui y sont venus pour s'abriter contre le chômage, et réduire les sureffectifs structurels de certaines institutions.

     En accroissant très significativement le revenu disponible pour 41 millions de citoyens, on accroît le potentiel de consommation et d'investissements intérieurs, et donc on tire la production vers le haut et sa contrepartie des créations nettes de nouveaux emplois industriels, et dans les services aujourd'hui trop dégradés comme la SNCF, la sécurité dans des quartiers populaires, ou la propreté dans des rues... Les réformes intégrant cette nouvelle organisation de la nation n'ont pas été menées. En 2007, N. Sarkozy devait taxer les spéculateurs et encourager les investisseurs, par des mesures fiscales. Le dispositif de la redistribution 1/3-1/3-1/3 après l'impôt sur les sociétés, était un bon outil que nous avons défendu. Il a disparu dans la bataille contre la crise financière et bancaire de 2007-2009. Et pourquoi ne l'a-t-on pas repris après ? Les allocations de type +100 euros sur le SMIC n'ont aucun sens économique, car elles ne rémunèrent rien pour stimuler les efforts. Et comment alors traiter l'agent de maîtrise qui avait 80€ de plus que le SMIC ? Le cadre devient-il déméritant s'il ne reçoit pas l'augmentation salariale conséquente en 2019... ou le "Gilet Jaune" changera d'épaule ? Pourquoi un nouveau réfugié de plus de 65 ans, qui n'a jamais travaillé ni en France, ni pour la France, serait-il mieux traité par rapport à une veuve française ayant travaillé toute sa vie pendant plus de 50 ans, et qui ne perçoit que 500€ ou 650€ de pension de retraite ? Il y aura des injustices qui resurgiront au milieu des revendications actuelles, avec le risque de la mise en question du droit d'asile, de l'accueil des migrants et des coopérations européennes.

     La redistribution, ce n'est pas de la générosité publique. C'est un impératif économique de rémunération équitable des efforts de celles et ceux qui contribuent à accroître la richesse dans le pays, où qui y ont contribué. Elle permet d'entretenir ou de stimuler la consommation et l'investissement privé dans le pays. Elle intervient ainsi dans la croissance de la production pour résorber le chômage par l'activité. Elle concerne les salariés qui travaillent, les retraités qui ont construit le pays et les performances dans l'éducation des générations qui nous suivent. Si la France ne réussit pas ces transformations, les populistes de tous bords -extrême gauche et extrême droite- s'empareront du pouvoir, et signeront le déclin du pays et de l'Europe.

Emmanuel Nkunzumwami
Écrivain-Essayiste
Auteur de "La France inquiète face à son avenir".
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Mail : emmankunz@gmail.com

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